En 2019, pour la première fois depuis 2013, le nombre de mineurs isolés étrangers demandant protection en France se stabilise et une légère baisse des personnes déclarées MNA est enregistrée : 16 760, soit un retrait de 1,5% par rapport à l’année précédente. Toutefois, leur prise en charge demeure une préoccupation majeure des acteurs politiques et associatifs, au niveau national comme dans les territoires. (…) Les jeunes issus de l’Afrique sub-saharienne présentent des caractéristiques communes à tous les autres mineurs isolés, telles que des causes et des projets migratoires multifactoriels, des expériences de la migration diversifiées, ou encore des niveaux d’éducation très hétérogènes. Mais ils présentent aussi des particularités propres à leur situation et à leur condition, en particulier la difficulté d’apporter la preuve de leur état civil dans une région du monde où quatre enfants de moins de 5 ans sur dix n’ont jamais été enregistrés à la naissance, ainsi que l’illusion de la maîtrise linguistique dans la mesure où beaucoup d’entre eux proviennent de pays francophones. Ces situations singulières en font des populations particulièrement vulnérables, tant en matière de reconnaissance institutionnelle de leur minorité que d’accès à l’éducation et à la scolarisation. Les problématiques auxquelles font face ces jeunes à leur arrivée en France sont de plusieurs ordres. En premier lieu, leur situation légale avec la reconnaissance institutionnelle en tant que MNA qui leur confère la protection de l’aide sociale à l’enfance (ASE). La demande puis l’obtention éventuelle du statut de MNA permettent l’accession à des droits sociaux, en particulier en matière de protection sociale et sanitaire. Ce sont ces conditions sociales qui ont retenu toute notre attention dans cette étude : c’est-à-dire la façon dont les droits sociaux s’appliquent ou non aux mineurs isolés étrangers, leurs expériences en la matière, ainsi que leur accompagnement par une multiplicité d’acteurs institutionnels, associatifs, professionnels ou bénévoles. Ainsi, il nous a semblé particulièrement pertinent de coupler éducation et alimentation afin de mieux saisir les pratiques et les représentations des acteurs qui ont en charge le suivi de ces jeunes. En effet, si depuis longtemps des réseaux associatifs se sont inquiétés de la scolarisation des mineurs isolés, celle de leur accès à l’alimentation est restée un point aveugle tant dans le milieu associatif bordelais qu’au sein même du travail social. Dans les deux cas, l’étude proposée ici permet d’interroger la place accordée, sur le territoire girondin, à l’étranger quand il est mineur et à quelle citoyenneté il peut prétendre ou pas. Par ailleurs, du point de vue des bénévoles et des professionnels, ces deux éléments permettent aussi de mettre en évidence les paradoxes dans lesquels ils sont pris lorsque les collectivités locales se défaussent de leurs prérogatives, notamment relatives à la mise à l’abri et au droit à l’éducation.