Connaissance par images : connaissance des idées ou connaissance des images ? <br> Autour du <i>Cratyle</i> de Platon - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Communication Dans Un Congrès Année : 2015

Connaissance par images : connaissance des idées ou connaissance des images ?
Autour du Cratyle de Platon

Résumé

Dans le passage du Sophiste 239c et suivants, l’Étranger d’Élée pose la question de la nature du sophiste, dont il dit qu’il possède « un art de simulacre » (phantastiken techne) et qu’il est un « faiseur d’images » (eidolopoion). Mais le sophiste pourrait répliquer en demandant qu’est‐ce que l’Étranger et Théétète appellent « image ». Théétète répond en proposant comme exemples « les images des eaux et des miroirs, les images peintes ou gravées et toute autre chose de la sorte », Mais l’Étranger n’est pas satisfait. Il est évident, dito il, que Théétète n’a jamais rencontré un sophiste. Le sophiste, en effet, ne veut rien avoir à faire avec ces types d’image: « Il feindra d’ignorer miroirs, eaux et vue même, et ce qu’il te demandera, c’est uniquement ce qu’on doit tirer à partir des logoi ». Ce que Platon veut ici signifier, à travers le dialogue, est que la question de l’image ne peut pas être confinée aux images artistiques ou techniques; au contraire, elle doit être généralisée à toute sorte d’image ou bien d’imitation, y compris les imitations et les images qui sont les logoi eux-mêmes, utilisés non seulement par le sophiste, mais par le philosophe aussi. Cela correspond fort bien, à mon avis, à ce que Socrate dit dans le Cratyle (423 b svv.), où il montre que les noms (onomata) sont une forme d’imitation (mimesis) de la réalité. Il ne s’agit pas de l’imitation vulgaire, telle que l’imitation des gens qui imitent les brebis et le coq; mais de l’imitation qui imite non pas la forme (schema) des choses, mais leur essence (ou la substance) de chacune: donc, non pas la couleur et le son, mais l’essence des deux. Dans la continuité du dialogue Socrate montre que le logos ne peut posséder cette fonction imitative de l’essence qu’au prix qu’on admette l’existence des essences en tant que telles, antérieurement à toute opération de signification réalisée par le logos. Mais il ne semble pas, d’autre part, qu’il soit possible pour l’homme d’être admis à une connaissance directe des essences, qui ne passe pas à travers du logos (cf. Cratyle, 439b). Donc, il semble qu’il se dresse le paradoxe suivant: pour connaître la réalité véritable les hommes n’ont rien de mieux que le logos/(onoma)/ discours; mais le logos est un discours qui imite la réalité, en donnant de celle-ci une certaine image (cf. République, 510b-d). Pour être sûr que le logos soit vrai il serait nécessaire, d’ailleurs, de pouvoir confronter l’image qu’est le logos avec l’original qu’il prétend décrire. Mais celui qui est en mesure de faire cela est évidemment en gré aussi de connaître la réalité sans besoin de faire recours à la médiation du logos. Par conséquent, ou bien (si l’homme n’a pas un accès direct à l’essence) la vérité du logos est invérifiable; ou bien (si l’homme a un accès direct à l’essence) le logos est superflu. Comment sortir de cette impasse ?
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Dates et versions

halshs-01208218 , version 1 (02-10-2015)

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Identifiants

  • HAL Id : halshs-01208218 , version 1

Citer

Franco Trabattoni. Connaissance par images : connaissance des idées ou connaissance des images ?
Autour du Cratyle de Platon. Séminaire IVI : Idée, Vérité, Image, Apr 2015, Nice, France. ⟨halshs-01208218⟩
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