Sous l’effet d’importantes innovations technologiques et d’une mondialisation accrue des échanges commerciaux depuis la fin des années 1980, de nombreuses transformations ne cessent d’affecter les industries culturelles. C’est dans ce contexte où les logiques du profit tendent à s’accentuer sur les marchés de la culture que de nombreuses filières ont cherché à démarquer leurs produits de ceux qui se rattachent au pôle de la grande diffusion. Bien qu’elle recouvre des pratiques et des représentations assez différentes suivant les secteurs concernés, la revendication d’indépendance émane d’instances ayant en commun de n’avoir renoncé ni à l’audience ni à la rentabilité économique. À partir du cas de l’Université de tous les savoirs (Utls), cet article est consacré aux enjeux de l’indépendance s’agissant d’un secteur généralement peu étudié : celui de la vulgarisation scientifique. Qu’en est- il en effet des enjeux de l’indépendance propres à une activité ayant à ajuster le contenu de la science aux contraintes de la diffusion élargie ? L’article montre ainsi que la formule de l’Utls, telle que l’a conçue Yves Michaud, est fondée sur la mise en avant d’une science de qualité (personnalités scientifiques de renom, institutions académiques prestigieuses, etc.) pour laquelle la ligne exigée est impérativement celle de la participation, de l’accommodement ou, à défaut, de l’indifférence aux ordres politique et économique. De ce point de vue, on peut dire qu’une telle entreprise reflète une synthèse plutôt inédite de dispositifs où les signes de l’indépendance s’établissent sur des dépendances multiples, en vertu des rapports d’intrication entre l’État et le marché qu’instituent ces nouvelles fractions dominantes au sein des espaces locaux, nationaux et internationaux du pouvoir.