ET LE DAGDA TRANSFORMA L’ULSTER

UN AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE DANS

TOCHMARC ÉTAÍNE, VERSION 1

par

Gaël HILY

Introduction

D’où vient le nom de Mag nAí «Plaine d’Aí » ? D’après le Dindshenchas, «Tradition sur les lieux éminents » , un personnage nommé Aí fils d’Allguba, esclave des fils de Míl, a défriché ce lieu avec l’aide de vingt-trois autres esclaves ; en récompense de cet acte, la plaine porte désormais son nom1. Ce récit constitue l’une des très nombreuses illustrations d’un acte de transformation du territoire que la tradition littéraire irlandaise du Moyen Âge a préservées. Outre le Dindshenchas, le Lebor Gabála Érenn

(LGÉ), «Livre des invasions de l’Irlande » , constitue l’autre corpus emblématique sur le sujet. Le peuplement de l’île, thème principal de ce récit, se traduit par la formation de la terre d’Irlande, avec la création de plaines, la formation de lacs ou de rivières2. Ainsi, lors de l’invasion menée par Partholón, il y a le jaillissement de huit lacs, la découverte de trois lacs et de neuf rivières, ainsi que le défrichement de douze plaines3. Dans le Dindshenchas et le LGÉ, les transformations des éléments du paysage se réalisent en fonction de motivations narratives différentes. La raison d’être du

Dindshenchas est d’expliquer les événements passés qui ont amené à ce que tel lieu ait telle forme et soit désigné par tel nom ; dès lors, ce corpus est clairement axé sur l’acte de ces transformations4. Le LGÉ raconte le peuplement de l’Irlande depuis la création du monde jusqu’à l’arrivée des fils de Míl ; ainsi, chaque modification qui apparaît sur le territoire s’inscrit dans un contexte d’appropriation de cette terre sauvage et inhabitée pour en faire un endroit approprié à l’occupation humaine5. De par sa fonction de récit d’ethnogenèse, le LGÉ est donc surtout axé sur l’aboutissement de ces transformations. Cette idée n’est toutefois que pure déduction, car, malheureusement, le texte ne donne aucune précision. En effet, la trame narrative proposée