La co-construction du récit dans la dynamique de l'entretien clinique à but de recherche est ici précisément observée, en pointant l'influence de l'interviewer sur la dimension explicative et interprétative du discours de l'enquêté. Cette observation du fonctionnement interactionnel de l'entretien débouche sur une réflexion sur la construction de l'identité narrative à travers le dialogue.
Sont développés au préalable les aspects théoriques suivants : dimension dialogique du récit, configuration et sélection des événements dans le récit, mélange du particulier et du générique dans le parler de soi, équivocité de la notion d'auteur pour un récit de vie.
C'est ensuite l'activité narrative en tant qu'élaboration par reformulations, questions et mouvements successifs qui est observée à partir d'extraits commentés, en distinguant précisément : récit explicatif ou explication narrativisée « offerte », puis parmi les explications, celles qui sont :
- proposées par l'enquêté après avoir été induites par l'interviewer,
- proposées par l'interviewer et refusées par l'enquêté,
-demandées par l'interviewer, puis fournies ou non, par l'enquêté.
Certains des aspects qui entrent en jeu dans la construction de l'« identité narrative » sont enfin examinés. Après une définition de cette notion à partir de l'approche de Ricoeur, est discuté le fait que cette identité non seulement s'invente, mais se travaille dans la pratique de l'entretien. A partir de ce point de vue, l'entretien est finalement apparenté à un outil sémiotique au sens de Vygotski (1934)