Cette communication en Analyse de discours (Maingueneau, 1991, 1995, 2005) se fonde sur l'observation d'un corpus de lettres authentiques adressées à des Institutions ou entreprises françaises dans la perspective de s'interroger sur les relations d'influence réciproque entre écriture argumentée, représentation du travail et relation clientèle. Ainsi, les documents convoqués ont été catégorisés sous l'étiquette générique « écrits vers le travail » : leur production met en contact la sphère « domestique » et la sphère « professionnelle ». Leur réception déclenche en effet une activité de travail spécifique et le plus souvent un processus de médiation et de résolution du problème ou du dysfonctionnement constaté. Qu'ils émanent de clients ou d'allocataires d'aides sociales par exemple, ces courriers répondent chacun à un projet argumentatif (Amossy, 2000, 2005) affirmé dont l'efficacité reste particulièrement tributaire de la prise en compte de l'auditoire (Perelman et Tyteca) et de ses spécificités (auditoire homogène, composite, acquis ou non). Les énoncés qui sont analysés ici sous cet angle révèlent des représentations notamment en termes de fonctionnement interne de l'entreprise, de comportements des agents, d'incohérence discursive, etc..., qui participent de l'orientation argumentative du discours et qui mettent en jeu l'instance réceptrice adressée – entreprise ou service public, avec les spécificités propres à chaque situation -. Il s'agit donc d'extraire de ces courriers spontanés et des comportements sociolangagiers qui s'y révèlent les modalités par le biais desquelles se détectent des représentations du travail et de la relation de service public ou de service industriel et commercial en posant un rapport de co-construction entre les énoncés d'une part et les représentations plus ou moins collectives du travail d'autre part. Après avoir cerné la catégorie générique « écrits vers le travail » (Equoy Hutin, 2006), on montre dans un premier temps que la conduite d'un projet argumentatif - que ce soit sur le plan des stratégies argumentatives (types d'arguments convoqués), énonciatives (ajout parenthétique, des modes de désignation, du jeu sur le caractère multiple de l'instance adressée, implicite ...), du stéréotypes (Amossy, Herschberg-Pierrot, 1997) ou de l'appropriation de la norme épistolaire (Adam, 1998) - convoque et révèle des représentations souvent négatives du travail et de l'activité professionnelle du destinataire. Et, dans un second temps, à partir de l'exemple du traitement des lettres de réclamation dans une agence France Telecom, on tente d'instaurer ces écrits spontanés comme des gisements de savoirs disponibles et pertinents pour les entreprises concernées, leur mode de fonctionnement et leurs stratégies de communication. Car il semble que l'Entreprise gagnerait à apprendre à mieux entendre ses partenaires (Borzeix, 2001) et à ne pas se satisfaire d'analyses de contenu restreintes à l'identification statistique d'items d'insatisfaction telle qu'elles sont le plus souvent pratiquées. En somme, cette communication propose quelques éléments de réponse aux interrogations suivantes : Quelles sont les modalités de l'écriture du travail et de l'activité professionnelle dans les écrits vers le travail ? Quelles images du travail ces énoncés donnent-ils à voir ? Les représentations véhiculées sont-elles homogènes, hétérogènes, voire conflictuelles d'un client ou allocataire scripteur à un autre ? En quoi les contraintes et les spécificités de la situation de communication (différée, institutionnelle, conflictuelle) peuvent-elles instituer ces discours en source d'observation privilégiée ? Que peut apporter une analyse de discours des écrits vers le travail sur le plan de l'amélioration de la communication et de la relation clientèle ?