Charles Travis est un philosophe contemporain qui poursuit la critique du représentationnalisme philosophique que Wittgenstein avait initiée dans sa « seconde » philosophie. Le représentationnalisme est cette posture philosophique qu'on retrouve en philosophie de la perception, en philosophie du langage et en philosophie de l'esprit, et qui consiste à considérer qu'une sorte d'interface s'interpose nécessairement entre le monde et le sujet qui le saisit, que ce soit sous forme perceptive, linguistique ou conceptuelle. L'idée est que nous ne saisissons le monde qu'au moyen d'une structure déterminée qui rend compte de ses traits constitutifs et, par conséquent, de l'identité propre qui est la sienne. La représentation (perceptive/linguistique/conceptuelle) du monde que nous avons serait précisément ce qui nous permettrait de saisir le monde pour ce qu'il est et non pas pour autre chose. Ainsi, la pensée que l'eau est bleue serait une saisie correcte du monde parce que, étant donnée sa structure (ou son « contenu »), elle rendrait compte du fait que, dans le monde, l'eau est bleue. L'argumentation générale de Ch. Travis consiste à montrer que l'identité d'une pensée donnée à propos du monde ne peut toujours se spécifier que dans un contexte donné, dans lequel elle prend sens en ce que seul le contexte permet de comprendre ce qu'il faut entendre par cette pensée en la situant. Cet argument « contextualiste » entend faire renoncer à la volonté de rechercher des structures immuables supposément nécessaires pour rendre compte du fait que nous pensons correctement le monde tel qu'il est. Au contraire, il montre qu'on ne peut atteindre le monde lui-même – et sauver le réalisme – qu'à congédier ces entités fictived, intermédiaires illusoires qui reconduisent au platonisme et à son pendant, le scepticisme.