Depuis quelques années en France, la thématique de la " territorialisation des politiques publiques " a fait une entrée remarquée sur l'agenda scientifique des questionnements perçus comme légitimes en science politique. Les travaux de la jeune recherche consacrés à la montée en puissance des grandes collectivités locales, à l'Union européenne et aux initiatives de démocratie participative sont pour beaucoup dans cet engouement récent. Le territoire y surgit sur des questions d'actualité concernant la hiérarchisation des priorités publiques, la circulation des idées, la compétition politique et les mobilisations collectives. Pourtant, si le nom commun " territorialisation " et l'adjectif " territorial " s'invitent volontiers dans les analyses, force est de reconnaître qu'il s'agit de notions mal balisées et souvent ambiguës. Nos collègues étrangers s'en étonnent ou s'en amusent en soulignant que la problématisation révèle souvent des sentiers intellectuels étroitement liés à l'atelier des politistes français concernant la place et le rôle de l'Etat dans l'analyse de l'action publique. Le diagnostic n'est pas erroné mais l'ampleur et la diversité des travaux dans ce domaine incitent à prendre au sérieux les avancées en présence, d'autant que les thèses sont souvent engagées dans une perspective comparatiste internationale. Pour commenter cet état de l'art, nous souhaitons présenter les définitions et débats académiques en deux temps : en revenant d'abord sur les principaux ingrédients made in France de la question territoriale (les empreintes laissées par le droit, la sociologie des organisations et le management public) puis en discutant quelques unes des controverses scientifiques qui enrichissent et dépassent cette perception franco-ethnocentrée dans ses dimensions sectorielle, scalaire et démocratique.