L’étude des formes d’emploi instable dans le journalisme amène à réinterroger les sources statistiques habituellement utilisées, à les compléter par d’autres données disponibles, et finalement à reconsidérer l’appréhension plus globale de l’espace professionnel. Tout d’abord, les données de la Carte d’identité des journalistes professionnels (CCIJP) méritent d'être questionnées quant à la définition et au comptage qu’elles donnent des "pigistes", définis en fait dans un sens très large. Ces données peuvent être retraitées, afin de dégager des catégories plus fines, en distinguant pigistes et CDD, en repérant les demandeurs d'emploi, les refus de cartes et les dossiers sans suite, et doivent surtout être comprises comme représentant le noyau le plus stable et intégré de la profession. Ensuite et surtout, la confrontation avec d’autres sources invite à déplacer le regard sur toute une série de marges, qui elles-mêmes questionnent le cœur de la profession. Il s’agit d’abord des données d’Audiens, la caisse de protection sociale des médias (ainsi que de la communication et de la culture), sur les personnes officiellement payées à la pige d’un point de vue administratif, des enquêtes Emploi et recensement de l’INSEE sur la catégorie socio-professionnelle de « journalistes », et enfin de toute une série de sources éparses et partielles sur les auto-entrepreneurs, les auteurs, les demandeurs d’emploi, les formations en information et communication, qui permettent d’appréhender les différentes states et secteurs du halo professionnel des journalistes instables. Il s’agit alors d’indices convergents d’une réalité professionnelle complexe, qu’il ne s’agit pas de mesurer définitivement mais d’éclairer sous différentes facettes