Les rites de mariage accusent une tendance à l’uniformisation qui se traduit par l’émergence d’un modèle « national », favorisée par la publication télévisée des noces des princesses (Lalla Meriem et Lalla Asmaa). Dans les rites traditionnels, la légitimation populaire de la monarchie se traduisait par l’identification du marié au sultan. Cette royauté éphémère constituait un rituel d’initiation du marié à l’exercice de l’autorité et du pouvoir. Elle exprimait, par ailleurs, les possibilités de dissidence de tout homme à poigne se revendiquant des qualités égales à celles du sultan. Le rituel « national » subvertit ces anciennes logiques « viriles » par l’identification de la mariée aux princesses. Ces logiques féminines d’identification induisent une dévirilisation du sujet masculin en réduisant le marié à la position subalterne de gendre du roi. Il s’opère ainsi un glissement des représentations « masculines » du souverain comme « Commandeur des croyants » et parangon de virilité pour tous les « hommes » à des représentations « féminines » de la Nation au sein de laquelle le roi apparaît comme le Protecteur suprême des droits et libertés des femmes, le Père omnipotent qu’aucun « sujet » ne peut imiter le temps d’un rituel, voire concurrencer dans l’exercice du pouvoir politique.