Dans l’histoire du mouvement ouvrier, le Front populaire constitue un tournant puisque les syndicats tendent à s’affirmer en tant que véritables acteurs sociaux grâce à une représentativité nouvellement acquise dans le cadre d’une expérience unique d’un syndicalisme de masse. La signature des accords Matignon et les différentes dispositions juridiques qui suivent - loi sur la conciliation et l’arbitrage du 31 décembre 1936 et création de la Cour supérieure d’arbitrage en 1938 - ouvrent un chantier considérable en termes de droit du travail qui nécessite un investissement important des militants syndicaux désormais impliqués dans des procédures nouvelles (délégués-ouvriers, conventions collectives, arbitrages, consultations). Seul syndicat jugé représentatif, la Confédération Générale du Travail devient durant cette période l’intermédiaire privilégié des gouvernements et du patronat dans l’élaboration et le contrôle des normes sociales. Toutefois, la Confédération Française des Travailleurs Chrétiens, exclue de la négociation de Matignon et la Confédération des Syndicats Professionnels Français créée en 1937, renforcent leur présence ou s’imposent durant cette période et parviennent à participer elles-aussi à ces nouvelles instances de régulation en bénéficiant, plus tardivement, d’une reconnaissance de représentativité. C’est à ce développement de l’aspect juridique de l’activité syndicale et des relations sociales que nous nous proposons de nous intéresser durant cette période.