L’insertion d’un poème au cœur d’une lettre est une pratique courante dans l’Antiquité tardive et au haut Moyen Âge. Ce poème peut être à l’origine de la rédaction et de l’envoi de la lettre ; il peut, de la même façon, être un prétexte à sa composition ou servir à son ornementation littéraire. À une telle diversité des rôles du poème au sein de la lettre répond la variété de contenu des pièces poétiques proprement dites : éloges funèbres, inscriptions funéraires, tituli pour des éléments du décor d’un édifice ou d’un objet, panégyriques, etc. Le poème dans la lettre forme une entité sémantique autonome ; il peut être extrait de son enveloppe, être lu et compris pour lui-même. Ce fonctionnement autonome est mis en relief dans l’écriture par le passage de la prose au vers (qui, sans être systématique, est le procédé le plus fréquent pour l’enchâssement du poème dans un environnement épistolaire), mais aussi par un changement générique des procédés d’écriture et des outils employés pour l’expression du langage. Si la distinction entre le genre épistolaire et le genre poétique est inopérante pour le haut Moyen Âge, les auteurs en question, de Paulin de Nole à Alcuin en passant par Venance Fortunat, mettent en place des écarts, des ruptures ou des accents esthétiques chargés d’exposer le poème. Cette communication s’attache plus particulièrement aux textes poétiques possédant des connexions formelles aussi bien avec le genre épistolaire qu’avec la documentation épigraphique en analysant quelques-unes des « inscriptions » connues à travers les lettres d’auteurs du haut Moyen Âge.