La loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation poursuivait l'objectif de responsabiliser la distribution du crédit tout en tenant compte de ce que, en temps de crise, le crédit soutient la consommation des ménages dont le pouvoir d'achat s'amoindrit. Cette contradiction se retrouve inexorablement dans nombre de dispositions de la loi à laquelle on a pu reprocher de ne pas aller au fond de la logique de responsabilisation du crédit (G. Raymond, Le surendettement dans la loi du 1er juillet 2010, RD banc. fin., mai 2012, dossier 22). Ainsi, l'article L. 311-9 nouveau du code de la consommation dispose que le prêteur « vérifie » la solvabilité de l'emprunteur à partir d'un nombre suffisant d'informations. Mais cette formule vague peut s'interpréter de manière extensive comme obligeant l'établissement de crédit à vérifier l'exactitude des renseignements fournis par l'emprunteur, ou plus restrictivement comme lui imposant simplement une vérification de son niveau d'endettement (F. Crédot et T. Samin, L'obligation de mise en garde est-elle compatible avec le concept de crédit responsable ?, RD banc. fin. 2010, comm. 203). En outre, la question de savoir quelles conséquences tirer de cette obligation reste en suspens. Certes, elle conditionne le devoir d'explication personnalisée que l'article L. 311-8 fait peser sur le prêteur et que l'on peut sûrement qualifier de devoir de mise en garde (V. Legrand, Le crédit renouvelable va-t-il devenir responsable ?, D. 2011. 1990). Toutefois, la loi ne lui impose pas de refuser le crédit qui n'est manifestement pas en adéquation avec la situation financière de l'emprunteur. Probablement soucieux de remédier aux lacunes de la loi, le député Jean-Christophe Lagarde a déposé une proposition de loi le 26 septembre dernier.

Cette proposition milite pour introduire dans le code de la consommation un nouvel article L. 311-10-2 selon lequel le prêteur qui a accordé un crédit « sans s'être préalablement informé de la solvabilité de l'emprunteur et notamment de sa situation d'endettement global et de ses revenus » ne pourra pas agir en recouvrement contre celui-ci, ni contre son éventuelle caution, s'il est défaillant. Une exception est cependant posée lorsque, sciemment, l'emprunteur a « fait des fausses déclarations ou remis des documents inexacts en vue d'obtenir un crédit ». Cette disposition nouvellement proposée est courageuse car, bien qu'elle n'édicte pas ouvertement d'interdiction aux établissements financiers de prêter à un emprunteur insuffisamment solvable, elle s'en fait probablement l'écho (I). Toutefois, il ne faudrait pas qu'elle soit interprétée comme un moyen commode de ne pas payer ses dettes (II).