Le monde académique jeta ponctuellement un oeil curieux sur la pratique de la bibliopégie anthropodermique. Cependant, aucune synthèse sur ce sujet n'a été entreprise. Les publications récentes se concentrent sur des cas particuliers (Harrisson 2017) ou bien se contentent de relayer les mêmes informations depuis les références anciennes les plus prolixes (Blumenthal [1955] (1969), Thompson 1946, 1969). Cette frilosité des chercheurs est évidemment induite par le caractère sensible de ces objets patrimoniaux qui suscitent des débats éthiques. Cependant, des obstacles méthodologiques sont également en cause dans la sous-exploitation de ces objets dans la recherche en archéologie historique. Dans cet article, nous proposerons une évaluation des méthodes physico-chimiques permettant leur analyse dans le but d'établir un protocole adapté. Nous avons également entrepris de mener à bien un catalogage exhaustif des livres en peau humaine connus à travers une revue de la littérature et une consultation des sources archivistiques des grands hôtels de ventes aux enchères français, britanniques et américains. Après avoir compilé les données en un catalogue extensif, nous avons vérifié l'existence de chaque ouvrage auprès de l'institution supposée le conserver, puis rassemblé des données inédites sur les artefacts en question grâce à un dialogue avec les conservateurs et les libraires. Nous présenterons ici une synthèse de ce catalogue qui constitue le tout premier inventaire raisonné autour du phénomène de bibliopégie anthropodermique. Enfin, l'analyse de notre corpus nous mènera à des réflexions sur les fonctions sociales que ces livres spéciaux ont pu revêtir.