Comme Ulrich Beck le notait dans La société du risque (1986), le changement radical des menaces qui pèsent sur les sociétés contemporaines implique un changement tout aussi radical des modalités de pilotage et de régulation de l’action collective. Le processus de mondialisation aggrave encore la distorsion entre les capacités de maîtrise des crises et la réalité des menaces. Dans ce contexte, le véritable enjeu des réformes publiques est dans la capacité des États à répondre à quelques questions : comment faire évoluer le cadre et les modes d’action de l’État-nation, qui reste le lieu incontournable du contrôle démocratique, dans un processus de globalisation qui s’accompagne d’une multiplication des risques systémiques ? comment adapter les stratégies publiques à une action collective fondée sur le paradigme du développement durable, impliquant des formes d’arbitrage nouvelles entre biens collectifs et activités marchandes ? Face à ces enjeux, les stratégies de réforme des États et de leurs systèmes de management sont totalement obsolètes. Pour étayer ce constat, ce papier confronte les principes fondamentaux d’organisation de l’action publique aux analyses de quelques sociologues qui ont particulièrement pensé les mutations en cours : Antony Giddens et les conséquences de la modernité; Ulrich Beck et la société du risque ; Hans Jonas et le principe responsabilité; Jean-Pierre Dupuy et le catastrophisme éclairé ; Francis Chateauraynaud et les lanceurs d’alerte ; Saskia Sassen et la ville globale etc. Cette confrontation met en évidence l’ampleur du retard dans la façon dont l'action publique s'adapte aux défis du monde contemporain.