Depuis quelques décennies, les symptômes d'un grave malaise de la société française se multiplient : émeutes urbaines récurrentes ; aggravation des inégalités économiques, sociales, culturelles, sanitaires, territoriales, etc. ; dégradation de la confiance dans les institutions, qui se manifeste notamment par l'accroissement constant du taux d’abstention lors des élections et par un renforcement régulier des votes protestataires. Au delà des causes particulières de ces phénomènes, leur cumul et leur convergence traduisent une remise en cause des valeurs de la République et de l'adhésion de l'opinion au système politique qu'elles fondent. Cette évolution renvoie à une crise profonde du modèle d'intégration à partir duquel s'est constituée, au fil des siècles, l'unité territoriale et sociétale de la France. Pour éclairer les mécanismes à l’œuvre dans ces bouleversements, cette communication rappelle comment, autour de l'émergence progressive de l'idée de nation, se sont mis en place des dispositifs idéologiques, juridiques et politiques dont l'articulation originale a constitué le modèle français d'intégration. Puis elle analyse, au delà d'une approche purement socio-économique, les caractéristiques fondamentales de la crise de ce modèle, et notamment de ses composantes territoriales et imaginaires. Enfin elle montre que, pour repenser la conception française de l'intégration en conservant des spécificités qui ont une dimension fortement identitaire, il est nécessaire de dépasser les insuffisances du « vivre-ensemble » et de répondre à l'impératif de « faire-société ». La communication s'appuie sur l'étude de situations concrètes dans quatre grands types de territoires fragiles : les ghettos migratoires, les centres-villes en crise, les zones rurales en déshérence et les régions industrielles en déclin.