L’introduction du volume sur les Communautés d’habitants médiévales rappelle tout d’abord la genèse du programme développé au sein du Laboratoire de Médiévistique Occidentale de Paris (LaMOP) et son positionnement par rapports aux modèles de l’incastellamento (P. Toubert), de l’encellulement (R. Fossier), du communalisme (P. Blickle) ou de l’inecclesiamento (M. Lauwers). La démarche suivie a voulu se démarquer des lectures intentionnalistes (qu’elles soient seigneuriales ou proto-démocratiques – par l’union des dominés contre les seigneurs) au profit de logiques sociales plus abstraites (faisant par exemple de la communauté d’habitants une forme non consciente d’auto-encadrement des dominés), et a voulu prendre au sérieux, d’une part, la dimension spatiale du processus (les habitants se concevant eux-mêmes par rapport à un lieu commun, ce que nous appelons encore de nos jours les « racines ») au lieu de faire de l’espace un simple cadre ou, au mieux, une ressource (l’espace devenant alors simplement identique aux espaces, cultivés ou non) et, d’autre part, le sens social de l’habiter comme forme historique de rapport à l’espace (d’où le concept, spécifiquement adopté dans le volume, de « communauté d’habitants »). Mais dans « communauté d’habitants », il y a aussi « communauté », et donc il s’est agi de tenter de définir ce concept et notamment ce qu’il signifie, abstraitement, du point de vue des membres de la communauté (par opposition notamment aux groupements constitués par focalisation sur une personne référente, comme un monastère, une paroisse, une familia féodale ou un feu). Tout ceci est régulièrement appuyé sur l’examen d’un cas d’école, à savoir la formation de la ville d’Ardres au XIe siècle, telle que la relate vers 1200 Lambert d’Ardres.