A l’instar des autres massifs de montagne, les Pyrénées ont vu se déployer des formes diverses et très élaborées de gestion collective des ressources par les communautés villageoises. Ces formes collectives ont résisté aux attaques libérales contre la propriété commune et à l’évolution des sociétés montagnardes. A l’heure actuelle, 80 % des surfaces d’altitude pyrénéennes relèvent toujours de la propriété communale ou domaniale et sont gérées collectivement par des groupes d’éleveurs ou par les collectivités locales elles-mêmes. Cet article interroge la capacité de résistance et d’adaptation de ces formes d’organisation collective héritières des usages communautaires historiques, à travers leur confrontation aux questions vives posées par les modalités de mise en œuvre de la politique agricole commune. Après avoir clarifié la structuration actuelle des formes d’organisation collective à l’œuvre sur les espaces pastoraux (propriété, gestion, pratiques) et rappelé l’évolution de la prise en compte des espaces et des acteurs pastoraux par les politiques agricoles, nous nous attachons à présenter les effets de la nouvelle politique agricole commune sur les cadres collectifs d’action, mais également sur tout le système de pensée des acteurs pastoraux. En introduisant une ressource monétaire individuelle dans des systèmes d’action construits dans la longue durée sur la régulation de la mise en valeur des ressources naturelles collectives, la politique agricole actuelle conduit à une fragilisation inédite des gestionnaires collectifs, confrontés à un enjeu majeur de reconnaissance et de prise en compte différenciée.