L’analyse biographique en sciences sociales est confrontée à la question de la réduction du sens : comment rendre compte des histoires et des récits, comment les comparer, comment dépasser la particularité de chaque histoire ? Il s’agit en effet d’« expliquer » une vie, de dégager ce qui fait qu’elle s’est ainsi déroulée. Tout chercheur est alors confronté à une tension entre d’un côté la singularité du récit individuel qu’il recueille et dont il voudrait restituer au mieux la complexité, et de l’autre la nécessaire réduction des informations qu’il doit effectuer pour pouvoir comparer, communiquer et analyser. L’analyste doit donc, dans cette tension entre complexité du réel et clarté de son explication, s’attacher à trouver le « bon » compromis au regard de ses données et de ses objectifs. Expliquer sans aplatir, déduire sans réduire à une causalité simpliste, identifier et contextualiser sans s’enfermer dans l’irréductible singularité, généraliser sans abstraire ni caricaturer, et tenir compte du temps… tels sont les défis posés. Dans ce chapitre sont proposées des pistes méthodologiques visant à respecter au plus près ces constats et leurs enjeux théoriques : mieux envisager la pluralité des perspectives (domaines, échelles, temporalités), traiter sérieusement les articulations qui existent entre ces dimensions, et inscrire tous ces éléments dans une démarche processuelle.