Très présentes, les ONG occupent une position hybride au sein du système international. Ni émanations véritablement officielles des organisations interétatiques ni des États (tout en étant très institutionnalisées dans le fonctionnement de ces dernières) ni organisations totalement indépendantes (au sens où elles sont souvent dépendantes de financements publics dont elles suivent les cadres d’action très contraints), elles s’inscrivent dans l’ambiguïté structurelle qui caractérise les systèmes de la régulation internationale du début du xxie siècle. Outre l’effacement progressif des frontières entre organisations publiques et organisées privées, les arènes de la décision internationale se distinguent par le style administratif des bureaucraties qui en assurent l’administration quotidienne. Composant avec une multiplicité d’acteurs étatiques et non-étatiques, souvent dans un environnement multilatéral complexe et instable, les bureaucraties transnationales ont la particularité d’être plus autonomes – en termes de contrôle politique et de latitude d’action – que leurs homologues nationales ou locales. Servies par la grande hétérogénéité professionnelle et culturelle de leurs personnels, détentrices d’une réelle compétence pour assurer la coordination multi-niveaux des programmes des organisations interétatiques, les bureaucraties transnationales tendent à s’émanciper de la tutelle théorique des responsables politiques et à nouer des rapports privilégiés avec les ONG choisies pour à la mise en œuvre desdits programmes. Maillon à part entière de la chaîne de production de l’action transnationale, ces ONG sont poussées à se professionnaliser et s’écarter de l’image d’un tiers secteur dont les vertus supposées reposaient pour l’essentiel sur le principe d’actions conduites par des bénévoles exclusivement animés par des idéaux moraux.