Loisirs et éthique du travail en Europe : un nouvel enjeu populiste ?
Résumé
La question du rapport au travail est une dimension essentielle de la réflexion proposée de longue date par Ronald Inglehart quant à l’essor de valeurs post-matérialistes comme phénomène central de la transformation des valeurs en Europe depuis les années 1960. La question de l’éthique du travail et de la « méritabilité » (deservingness) est, elle, au cœur d’une important littérature internationale consacrée à la reconfiguration contemporaine des enjeux socio-économiques et à l’intersection des valeurs économiques et morales dans l’explication des orientations politiques. Éthique du travail et méritabilité sont en particulier considérées comme des dimensions centrales de l’économie politique de la droite radicale populiste telle qu’incarnée en France notamment par le Rassemblement national (RN) de Marine Le Pen. La littérature récente a souligné les liens qui existent entre une vision « producériste » de la société –fondée sur la défense des producteurs authentiques et laborieux face à la menace perçue de tous les « profiteurs », immigrés ou bénéficiaires des aides sociales– avec le vote en faveur des droites radicales populistes. A partir des données des enquêtes Valeurs, ce chapitre propose d’examiner le rapport que les Européens entretiennent avec le travail et les loisirs depuis le début des années 1990. Dans une seconde partie, on traitera plus spécifiquement de la dimension morale du travail, du rôle que cet éthos du travail comme « devoir » joue dans l’univers normatif des Européens et l’orientation de leurs choix politiques, en particulier s’agissant du vote en faveur des droites radicales populistes.
Origine :
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