Comme pour la plupart des grands projets d’infrastructure depuis 50 ans, le « désenclavement » de Castres-Mazamet est le principal registre de justification utilisé par les promoteurs du projet d’autoroute A69 dans le sud du Tarn. Pourtant les recherches en aménagement du territoire démontrent depuis 30 ans qu’il n’y a pas d’automaticité : une infrastructure de transport n’est pas forcément synonyme de développement économique pour les territoires concernés. Le « mythe du désenclavement » fonctionne encore en 2023 à toutes les échelles : locales, régionales et nationales. C’est la construction d’un projet de territoire partagé entre des acteurs aux stratégies multiples qui favorise le développement économique tant convoité. Or l’élaboration d’un tel projet de territoire à l’échelle du tracé de l’A69 n’a pas véritablement été entreprise, malgré les nombreux dispositifs réglementaires disponibles et les outils de planification qui auraient pu en être les supports. Il a fallu attendre la fin de l’année 2022 pour qu’émerge une ébauche de gouvernance d’un projet de territoire qui reste encore à construire. Cela ne peut qu’interroger sur la réalité de l’ancrage territorial de l’infrastructure autoroutière prévue dans le sud du Tarn. Au regard des dynamiques socioéconomiques et de l’attractivité que connaît le bassin de vie Castres-Mazamet, ce territoire peut difficilement être qualifié d’ « enclavé ». Les limites de la notion elle-même ont été montrées : il faudrait plus justement parler de « sentiment d’enclavement » exprimé par certains acteurs en particuliers, au premier rand desquels figurent les entrepreneurs déjà connectés aux marchés nationaux et internationaux qu’offre la métropolisation. Cela n’a rien à voir avec une démarche de développement local. Le projet d’autoroute vise à amplifier des flux de capitaux et de marchandises déjà existants avec la métropole toulousaine. Il ne s’agit pas d’une logique de « désenclavement » d’un territoire qui serait en « crise », mais d’une logique d’accélération de la croissance de certaines activités économiques par la réduction des coûts et l’accès au potentiel logistique qu’offre le bassin Castres-Mazamet.