Notre article explore empiriquement l'écheveau complexe d'action publique et des mécanismes d'action sanitaire lors de la crise du covid-19 au Congo-Kinshasa. Elle s'appuie sur une enquête de terrain et s'inscrit dans l'anthropologie du développement et de l'aide, élargie à deux de ses " nouvelles frontières " : l'action publique (Olivier De Sardan, 2011), qui s'inscrit dans la durée et la discrétion, et l'action humanitaire, qui est " marquée par l'urgence et la médiatisation " (Goamere et Ost, 1996). Dans cette double perspective, nous examinerons les réponses économiques et sanitaires des pouvoirs publics congolais pendant l'état d'urgence sanitaire décrété lors de la première vague de la pandémie de Covid-19 (mars à juillet 2020). Nous tenons à souligner la rapidité de la réaction du gouvernement congolais pour enrayer la propagation du coronavirus. Cette rapidité est remarquable dans un contexte où les services de l'Etat sont généralement considérés comme faibles, défaillants ou absents, et où les différents acteurs publics, qu'ils soient politiques ou administratifs, ont tendance à agir sans coordination. Cependant, la gouvernance quotidienne de l'état d'urgence sanitaire a parfois été défaillante et chaotique, contribuant ainsi à la généralisation du déni du risque au sein de la population. La résistance des citoyens aux mesures restrictives interdisant leurs activités quotidiennes de survie a favorisé l'émergence de risques concurrents et créé de nouvelles vulnérabilités, aggravant la situation de précarité et de vulnérabilité socio-économique des travailleurs de l'économie informelle.