L'étude de l'attribution des prénoms fait partie, depuis longtemps, d'une approche de l'histoire sociale et culturelle. Elle révèle souvent des transformations fines de la place du religieux dans la société, en France à la fin du 18e siècle par exemple, ou est révélatrice de l'apparition de la mode dans la société du 19e siècle, et de son développement au 20e siècle. Elle fournit aussi de beaux modèles de diffusion territoriale, marquant les limites des cultures paysannes et urbaines du 19e, les lignes de circulations principales aussi bien que des frontières culturelles ou linguistiques. Ces pratiques, largement étudiées dans le monde européen catholique ou protestant, l'ont été beaucoup moins dans le monde orthodoxe russe et on ne compte que peu d'articles traitant de cette question dans la Russie du 18e au 20e siècle. En Russie orthodoxe comme dans les autres confessions chrétiennes il a été convenu qu'en « attribuant le prénom d'un saint, nous devons suivre leur piété, prendre en exemple leur vertu, et leur demander de prier pour nous aider et nous protéger ». Pour étudier le choix d'un prénom pratiqué dans la population orthodoxe paysanne du 19e siècle et de la première moitié du 20e siècle résidant dans la région de Moscou nous avons abordé les registres paroissiaux, ou metritčeskie knigi, pour comparer les dates de naissances, les prénoms au baptême, les calendriers ecclésiastiques pour chaque année et les prénoms des aïeuls.