Expériences bénédictines en Aquitaine du Nord sous Louis le Pieux : contribution à l’histoire de la diffusion de la regula Benedicti à l’époque carolingienne
Résumé
In his Vita Benedicti, Ardon considers the success of the Benedictine establishment in Aquitaine as a prefiguration of the reform movement that would affect the regnum Francorum as a whole from 816-817 on. This contribution therefore proposes to observe Aquitanian realities (in particular in the northern part of the kingdom where the main points of Carolingian power are concentrated), thanks to a critical reading of regional sources, which are unfortunately too rare and sometimes interpolated. This journey through the documentation, taking into account both ancient and newly founded monasteries instituted in the Carolingian time, allows us to better understand the timing and extent of the Benedictine mutation, and leads us to nuance the picture drawn by Ardon. The early adoption of the rule of Saint Benedict at Nouaillé should not hide the fragility of the first attempts, nor the existence of a clerical alternative sometimes erased by later testimonies, or the fact that the "reform" happened later than usually thought, under Charles the Bald and Pepin II of Aquitaine more than under Louis the Pious. Beyond the cases of Nouaillé, Saint-Savin and Charroux, often cited as emblematic, the Aquitanian success of Benedict appears to be half-hearted.
Dans sa Vita Benedicti, Ardon fait du succès de l’implantation bénédictine en Aquitaine une sorte de préfiguration du mouvement réformateur qui touchera l’ensemble du regnum Francorum à partir des années 816-817. L’article se propose donc d’observer la réalité aquitaine, en particulier dans la partie nord du royaume où se concentrent les points d’ancrage du pouvoir carolingien, grâce à une lecture critique des sources régionales, malheureusement trop rares et parfois interpolées. Ce parcours dans la documentation concernant tant les monastères de fondation ancienne que les établissements institués à l’époque carolingienne permet de mieux appréhender le rythme et l’ampleur de la mutation bénédictine et conduit à nuancer le tableau dressé par Ardon. La précocité de l’adoption de la règle de saint Benoît à Nouaillé ne doit ainsi faire oublier ni la fragilité des premiers essais, ni l’existence d’une alternative cléricale parfois gommée par les témoignages ultérieurs, ni le caractère tardif de la « réforme », sous Charles le Chauve et de Pépin II d’Aquitaine plus que sous Louis le Pieux. Au-delà des cas de Nouaillé, Saint-Savin et Charroux, souvent cités comme emblématiques, la réussite aquitaine de Benoît semble finalement se dessiner en demi-teinte.