L'utilisation systématique des termes "architecte" ou "innovation" risque de nous guider dans les ornières de l'anachronisme dès qu'on pense trouver des acteurs savants ou des éléments nouveaux dans la création architecturale. Lorsqu'on observe les comptes de construction et les actes de la pratique conservés du XIe au XIIIe siècle, il est possible d'identifier avec plus de précision les acteurs des chantiers de forteresses et d'esquisser les processus de transmission des savoirs entre maîtres et compagnons mais aussi entre techniciens et clercs de travaux. L'intérêt porté à la mécanique à cette période, les perfectionnements de l'ingénierie et de l'outillage et la part des circulations techniques démontrent que certains chantiers de construction sont des lieux d'hybridation des savoirs théoriques et pratiques.