Les Années 50. Aux origines de l'anthropologie française contemporaine
Résumé
The 1950s were a momentous turning point for French anthropology, a time of existential questioning about the purpose and the future of a discipline faced with a world turned upside down. With the founding fathers of ethnologie française gone, their heirs were gradually taking over the reins in a new institutional landscape, while a younger generation born in the 1920s and 1930s was trained to discover the field and explore new research topics. Mauss’s legacy was tuned by his many disciples to their own anthropological goals which were quite irreducible to each other. The emerging critique of anthropology by African-Caribbean, African and Asian intellectuals was beginning to be heard in French academia in an unprecedented manner. Some Africanist anthropologists updated their scientific agenda and believed this was a lesson for the entire discipline. The 1950s were the last colonial decade of French anthropology, the only one in which applied anthropology was put into practice in a colonial situation. French ethnologie at home was being reshaped and was gradually being emancipated from the antiquarian vein of folklore studies.
In sum, what did the 1950s mean for French anthropology? That is the challenging question answered in this new issue of the Carnets de Bérose series in two volumes, providing an unprecedented overview of this anthropological decade. It contributes to illuminating the whole field of the social sciences in the 1950s from the vantage point of French anthropology, looking beyond its fragmentation into cultural areas and subfields of research, beyond its tempting reduction to theoretical debates alone. The twenty authors gathered here bring together some of the common topics discussed in the anthropological village of this teeming decade.
Que sont les années 1950 pour l’anthropologie française ? Les fondateurs de l’ethnologie de l’entre-deux-guerres ne sont plus. Les héritiers, directs et indirects, prennent progressivement les rênes dans un paysage institutionnel recomposé tandis qu’une jeune génération, née dans les années 1920-1930, se forme et découvre le terrain, avec des objets de recherche renouvelés. Toute une génération de disciples s’approprie l’héritage maussien, acclimaté à une pluralité de projets intellectuels irréductibles les uns aux autres. C’est la première décennie de l’ethnologie de la France, qui se reconstruit en s’émancipant progressivement de la veine folklorique. C’est la dernière décennie coloniale de l’ethnologie française, l’unique où l’ethnologie appliquée se déploie en situation coloniale. Des africanistes font leur aggiornamento, estimant que la leçon vaut pour toute la discipline. C’est un moment d’interrogation existentielle sur les missions et le devenir de l’anthropologie, sur ses façons de questionner un monde bouleversé par le récent conflit mondial, le mouvement des indépendances, les guerres coloniales. Les premières remises en cause de la légitimité de la démarche ethnologique par les élites autochtones se font entendre.
Ce Carnet de Bérose en deux volumes contribue à l’intelligibilité du champ des sciences humaines et sociales des années 1950 depuis le poste d’observation de l’anthropologie française. Les vingt auteurs rassemblés restituent quelques-uns des sujets de conversation communs au village anthropologique de cette décennie foisonnante – communs ne signifiant pas consensuels.
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