Une notion centrale pour la théorie de l’art néerlandais du XVIIème siècle est celle de Naer het leven (d’après la vie), qui définit l’idée de création d’images d’après une observation prolongée de la nature ou du modèle vivant. Dans le contexte de l’important développement de la biologie à la période moderne, cette notion pose la question de l’entremêlement entre arts et sciences dans le cadre spécifique des Pays-Bas. Je souhaite étudier cette question en me penchant sur le cas particulier des animaux marins dans les natures mortes, puisque ceux-ci, contrairement aux espèces terrestres ou aériennes, ne pouvaient quasiment pas être observés vivants, encore moins dans leur milieu d’origine, et que les natures mortes leurs offrent une place centrale, en tant que sujet, et non plus comme simples accessoires à des actions humaines. Il s’agira notamment de comparer les images imprimées présentes dans les manuels scientifiques des XVIème et XVIIème siècles à celles peintes. Rares sont les dessins préparatoires de natures mortes de poissons, tout comme les analyses techniques de ces œuvres montrant les différentes couches picturales, ce qui ne nous permet aujourd’hui d’avoir que très peu d’informations sur la façon de procéder des peintres quant aux sources des motifs représentés. Mais la comparaison entre les œuvres peintes, et la production picturale imprimée de la période moderne révèle des échos, et de possibles inspirations entre artistes et illustrateurs scientifiques. Finalement, cela nous montrera que la dichotomie apparue durant la période contemporaine entre arts et sciences est en fait arbitraire, est n’a pas toujours eu lieu d’être, comme l’ont souligné des recherches récentes (GALLISON-DASTON 2007 ; SMITH 2006), mettant en avant les collaborations, entremêlements et hiérarchisations entre artistes et scientifiques.