L'activité patrimoniale connaît depuis trois décennies un débordement de ses cadres d'exercice institués. On propose ici quelques pistes de compréhension du phénomène, sans céder à l'imputation convenue de débauche patrimoniale ou de dilatation de la mémoire – laquelle trouve son origine dans le fait que le patrimoine est un « champ préoccupé » dans le cadre d'une association science-administration constitutive de l'État-nation. Une pragmatique du patrimoine met l'accent sur la diversité des formes d'engagement dans et de l'activité patrimoniale et des attachements qu'elles génèrent. À côté du régime de la critique caractéristique de la voie scientifique, se font jour d'autres modes de référence au temps et à l'espace qui ménagent des expressions à plusieurs voix et sur le registre du sensible. Avec pour hypothèse sous-jacente que le régime moderne d'historicité qui est principe de la politique du patrimoine n'est pas la seule manière d'être dans le temps dont disposent ou font l'expérience les collectifs des sociétés contemporaines.