L'idée selon laquelle la détermination de ce que je vois dépend du contexte ramène à une philosophie suffisamment partagée, selon laquelle le rapport perceptif à l'objet est toujours envisagé subjectivement selon une certaine perspective, sans dépendre d'une représentation qui nous le donnerait de telle ou telle manière. Ce n'est pas tant ce perspectivisme qui va distinguer le contextualisme perceptif que l'idée que, même si on a donné une caractérisation précise de la perspective en question, il reste encore une sous-détermination profonde de la nature de l'expérience perceptive elle-même. Cette sous-détermination, loin d'être la marque d'un privilège de la subjectivité, est exemplaire du caractère radicalement contextuel de toute expérience. La notion de contexte n'est donc pas un élément d'une sémantique de l'expérience qui pourrait être close sur elle-même, mais un outil radicalement critique de toute conception figée de l'expérience. Pour le comprendre, on développera tout d'abord dans ce qui suit le réalisme de Strawson, contre lequel (même si cela n'est pas toujours explicitement donné dans les textes) la position contextualiste d'Austin, puis de Travis s'est constituée, pour défendre une autre forme de réalisme, qui échappe à tout représentationnalisme.