Le Maroc de l'ajustement structurel, des privatisations et de la libéralisation économique présente un intéressant poste d'observation des recompositions des pouvoirs de l'Etat sur la régulation économique en contexte de mondialisation : nature et ressources de la puissance publique sont mis à l'épreuve de l'ouverture des frontières économiques et de la normalisation des marchés à l'échelle internationale. En termes d'économie politique, à côté de ses spécificités historiques et institutionnelles, il peut être considéré à bien des égards comme un cas « paradigmatique » dans la région MENA : le Royaume est exemplaire au regard des modalités, de l'étendue et des effets des réformes économiques dans lesquels il s'est engagé depuis le début de la décennie 1980. Il joue parfois le rôle de laboratoire pour l'exercice de nouveaux instruments de politique économique. Ce papier examine les logiques de régulation qui se dessinent après l'abandon du modèle « stato-developpementaliste » et du fordisme mais aussi devant les défaillances du compromis « néo-libéral » appuyé sur les figures classiques de « l'Etat correcteur du marché » ou de « l'Etat incitateur ou manipulateur d'incitation ». En étudiant les interférences des arènes économiques et politiques, il discute des faux-semblants de l'hypothèse d'une « régulation par le moins d'Etat ». Plutôt qu'une analyse macro des effets des réformes économiques, de leurs gagnants et de leurs perdants, de leurs effets pervers, voire de leurs dysfonctionnement, la trajectoire récente du Maroc engage à regarder comment se transforme l'action publique dans les secteurs économiques et sociaux, en matière d'allocation des ressources, en matière de prise de décision et finalement en matière d'exercice du pouvoir.