Au premier abord, écrire dans la presse pornographique n’est pas considéré comme une activité journalistique. Pour autant, certains de ces producteurs ont suivi une formation en journalisme, ou ont d’abord été employés dans des secteurs de presse non pornographiques, ancrés dans l’espace journalistique professionnel. Ces acteurs se réfèrent, dans l’exercice de leur activité, à des formes différenciées de conventions, de normes professionnelles, commerciales, sociales, éthiques : celles pragmatiques du journalisme telles qu’ils les ont apprises au cours de leur formation initiale ou dans la presse « traditionnelle » et celles qu’ils sont amenés à mettre en œuvre pour les publications pornographiques. Nous analysons les discours de ces acteurs afin de comprendre les représentations qu’ils se construisent de leurs parcours. Notre hypothèse est que leurs trajectoires professionnelle et intime influent non seulement sur leurs rapports à la sexualité, à la pornographie, mais aussi leurs relations aux collègues, aux sources d’information, à la question de l’anonymat, ou à leurs attentes en termes de carrière à venir… L’ensemble de ces éléments s’articule et crée pour chacun, un agencement particulier de principes, de pratiques, de représentations. Chacun mobilise ou non des ressources (compétences journalistiques, compétences sexuelles), selon son système de valeurs à la fois vis-à-vis de ce qu’il définit comme professionnel, et de sa conception de la « bonne représentation de la sexualité ». L’analyse compare les discours de ces acteurs avec ceux des producteurs n’ayant pas été formés au journalisme professionnel, et tente de cerner les convergences éventuelles entre leurs systèmes de représentations, les désaccords ou encore les stratégies d’identification, d’engagement ou de distanciation mise en œuvre à l’égard de l’objet et de l’espace social « pornographie » (professionnels, publics du X).