Le pontificat d’Innocent III marque une période de forte tension avec le royaume de France et son monarque. A travers la cinquantaine de lettres de son Registre concernant la France, le pape met en avant une argumentation théologique qui cherche vainement à amener Philippe Auguste à composition dans l’affaire d’Ingeburge. Pourtant, malgré les antagonismes, Innocent III rappelle fréquemment dans ses lettres ses liens anciens avec le royaume, son amour particulier envers le roi et montre le caractère exceptionnel du royaume, lequel a toujours défendu les libertates ecclesiastices, plus que tous les autres royaumes. Développant une dialectique de l’affection et de la déception, le pontife va jusqu’à menacer Philippe Auguste de ne pas s’écarter de la voie tracée par son père Louis VII, sous peine de grands malheurs. La Papauté veille donc à ce que le royaume de France reste fidèle à sa nature, du moins telle qu’elle a été définie par Rome, définition qui la rend inacceptable par le roi.