L'objet de cet article est l'étude conjointe et critique des usages politiques de diverses formes d'humour graphique - caricatures, dessins de presse, bandes dessinées - employées au fil des pages de deux publications féministes brésiliennes, Brasil Mulher et Nós, Mulheres, respectivement nées en octobre 1975 et juin 1976. Ces deux titres s'insèrent dans le vaste champ de la presse indépendante, surgie à partir du coup d'état militaire de 1964 au Brésil et obéissant à différentes logiques : la ré-articulation des mouvements de gauche, la possibilité d'une action politique et critique non armée ou encore la divulgation à l'échelle nationale des grandes campagnes d'opposition au régime. Il s'agit de mettre en lumière le rôle de ces formes d'humour employées par ces deux rédactions, majoritairement composées de femmes, dans un contexte politique autoritaire conduisant la presse féministe à mener un combat tout à fait spécifique : contre le pouvoir patriarcal et les valeurs conservatrices de la société, il s'articule également aux luttes menées par l'ensemble des organisations de gauche opposées au régime militaire. Les images satiriques, humoristiques et politiques analysées sont alors envisagées en tant que "double lieu" de contestation du pouvoir, militaire et patriarcal.