Les Activités Physiques et Sportives (APS) ont, depuis les années 2000, intégré un nombre croissant de politiques publiques françaises liées à la santé qui ont abouti en 2012 à un plan qui lui est entièrement dédié. Il semble émaner de ces politiques une « pensée » selon laquelle l’activité physique constituerait un moyen de prévenir les différents risques sanitaires contemporains, mais aussi d’engager les individus dans des pratiques régulières d’entretien de soi en les responsabilisant vis-à-vis de leur bien-être et de leur santé (Collinet, 2015). Les institutions tendent dans ce cadre à penser le sport non plus comme un simple loisir à développer parmi et pour les masses (Pociello, 1999), mais comme un moyen de prévenir les risques sanitaires (Bossy, 2010). Ce rapprochement inédit des champs du sport et de la santé, peu analysé jusqu’alors par les sciences sociales (Honta, 2015 ; 2016), a préfiguré l’amendement 144 de la loi de modernisation de notre système de santé (2015) qui permet au médecin traitant de prescrire une activité physique aux personnes en Affection de Longue Durée. Cet amendement, suivi d’un décret et d’une instruction qui en précisent les objectifs et les conditions de mise en œuvre, ne s’est pas construit en vase clos mais a impliqué une variété d’acteurs qui ont emprunté des itinéraires de mobilisation variés, en quête de reconnaissance ou de repositionnement. En effet, un des enjeux pour ces acteurs nombreux (Perrin, 2016) a été d’obtenir le droit de prendre en charge les patients ayant une prescription médicale et, plus encore, d’investir un nouvel espace social pour s’emparer d’une part de marché. Dans quelle mesure la dernière loi de santé est-elle alors l’aboutissement une dynamique commencée au début des années 2000, et en quoi ce processus est-il marqué par des reconfigurations importantes ? Tel est l’enjeu de notre présentation, qui s’inscrit dans une phase d’exploration socio-historique de notre travail de thèse. La communication se fondera sur une vingtaine d’entretiens semi-directifs avec des représentants des différentes institutions et groupes d’acteurs impliqués ; également sur un travail d’archive et d’analyse de la littérature grise (PNNS, PNAPS, Plan Sport-Santé-Bien-Être, MédicoSport, Lois etc.). Le propos, en revenant sur la construction des politiques publiques de santé intégrant l’activité physique, aura notamment pour objectif d’analyser la façon dont l’activité physique s’est façonnée dans la prévention primaire avant de se développer et de s’institutionnaliser en prévention tertiaire. Cela nous amènera également à interroger les intérêts et les positionnements des différents acteurs qui ont développé la pratique et lui ont donné une place centrale dans les politiques publiques françaises contemporaines. Nous tenterons de saisir l’objet à la croisée de la science politique et de la sociologie du sport et de la santé, afin de comprendre l’émergence et l’institutionnalisation de l’activité physique en tant qu’objectif de santé publique.