Il est traditionnellement attendu d’un mandataire social qu’il représente l’employeur dans les actes liés à la gestion de la société et qu’il en rende compte à ses actionnaires. À plus forte raison dans les grandes sociétés, son statut se distingue de celui du salarié. Quelques illustrations le démontrent, comme la possibilité de le révoquer sans qu’il puisse bénéficier du régime du licenciement du salarié ou comme les conditions d’accès à ses fonctions dans la société : il est désigné ou élu mandataire, ce qui exclut son embauche au titre d’un contrat de travail. Au demeurant, le lien juridique de subordination entre l’employeur et le salarié, indispensable à la qualification du contrat de travail, est a priori en contradiction avec les fonctions du mandataire social. Le cumul du contrat de travail avec la qualité de mandataire social relève donc d’une délicate opération. Pour autant, il n’est pas prohibé par le cadre jurisprudentiel et légal qui s’est au contraire attaché à le définir précisément. Il n’empêche que les codes de gouvernance d’entreprise Afep-Medef et Middlenext ne s’y réfèrent pas et proposent aux sociétés, en plus du cadre étatique, des normes de conduite spécifiques. Dès lors, le mandataire social peut-il être salarié de la société dans laquelle il exerce son mandat ? Si le cadre légal et jurisprudentiel conditionne cette possibilité selon la situation du dirigeant et selon le type de société concerné, le code Afep-Medef propose une restriction plus franche (5) alors que le code Middlenext offre la possibilité aux sociétés de déterminer la solution qu’elles jugent la plus idoine. Nous avons cherché à déterminer si les recommandations sont effectivement appliquées et suivies par les sociétés qui se réfèrent aux codes. Les questions auxquelles nous avons répondu mettent en exergue deux éléments principaux : tout d’abord, les sociétés rendent-elles compte de leurs pratiques en termes de cumul du contrat de travail et de mandat social dans leur document de référence ? Dans l’affirmative, déclarent-elles, par la même occasion, respecter les recommandations formulées en la matière par les codes de gouvernance d’entreprise ? Ensuite, dans les cas où les sociétés ont déclaré ne pas être en conformité avec les préconisations des codes, s’en justifient-elles, conformément au principe « appliquer ou expliquer » ? La recherche empirique menée permet d’élargir la réflexion et de mettre en lumière la particularité des pratiques de cumul du contrat de travail et du mandat social par les grandes sociétés et des solutions d’encadrement proposées par les codes de gouvernance d’entreprise. Quels sont les mécanismes et les finalités des recommandations des codes de gouvernement d’entreprise ? L’encadrement du cumul du contrat de travail et du mandat social poursuit une finalité singulière : il s’agit avant tout d’identifier et d’encadrer les pratiques en vue de rationaliser les rémunérations des dirigeants. Pour ce faire, les codes de ouvernance d’entreprise, et plus particulièrement le code Afep-Medef, opèrent des choix stratégiques dans leurs préconisations selon qu’ils visent des pratiques de cumul du contrat de travail et du mandat social qui ont lieu au sein de la même société ou qu’ils visent un cumul de fonctions dans un groupe de sociétés.