L’agglomération antique du col de Ceyssat (Ceyssat, Orcines, Saint-Genès-Champanelle). Contribution à l’étude du contexte archéologique du temple de Mercure (Puy-de-Dôme). Rapport de prospection thématique avec sondages n°2001-62 - HAL Accéder directement au contenu
Rapport (Rapport De Recherche) Année : 2003

L’agglomération antique du col de Ceyssat (Ceyssat, Orcines, Saint-Genès-Champanelle). Contribution à l’étude du contexte archéologique du temple de Mercure (Puy-de-Dôme). Rapport de prospection thématique avec sondages n°2001-62

Résumé

Les recherches conduites sur le col de Ceyssat depuis 1999 ont renouvelé notre connaissance de l’environnement proche du temple de Mercure sis au sommet du puy de Dôme, en démontrant l’existence d’une véritable agglomération associant des activités cultuelles, routières et funéraires. Placée sur le point le plus élevé de la voie reliant Lyon et Saintes, là où celle-ci franchit la chaîne des Puys, cette agglomération canalisait vraisemblablement le flux des pèlerins qui convergeaient, périodiquement ou à longueur d’année, vers l’un des plus prestigieux sanctuaires des Gaules. La distance séparant le temple de Mercure du chef-lieu de cité Augustonemetum nécessitait un relais. Quoi de plus logique que ce relais se soit développé autour du col, qui permettait l’accès le plus direct vers le sommet de la montagne sacrée ! On ignore encore l’essentiel sur cette agglomération, en particulier le détail de son organisation. On sait toutefois qu’un habitat probablement assez étendu et structuré existait déjà à la fin de La Tène. Le début du Ier siècle de notre ère se caractérise par de gros travaux de terrassements, qui voient la mise en place, selon un rythme qui nous échappe encore, d’un système d’esplanades sur lesquelles devaient se développer non seulement toutes sortes d’édifices cultuels, mais aussi des annexes liées aux pratiques religieuses et à l’accueil des pèlerins. Les activités religieuses semblent prendre une telle ampleur qu’on est tenté d’évoquer un véritable « complexe cultuel ». On ne sait rien, pour l’instant, des installations qui bordaient la voie romaine, dont le tracé n’est pas établi avec certitude. En revanche, et même si l’on en connaît mal l’organisation, la présence d’une nécropole est assurée. On peut même tenir pour certain qu’on y a incinéré au moins un personnage important, vers le milieu du IIe siècle, selon un rituel connu, mais ici particulièrement spectaculaire. La présence de cette nécropole confirme l’importance relative de l’agglomération et soulève la question de ses liens organiques avec le temple sommital. On aimerait savoir aussi pourquoi le site est abandonné peu après le milieu du IIIe siècle. Cette désaffection traduit-elle celle, plus générale, des cultes païens et en particulier de la dévotion à Mercure, le plus vénéré des dieux chez les Gallo-Romains ? L’intégration des données de fouilles dans leur contexte spatial révèle que le culte de Mercure prenait place dans un paysage très fortement humanisé, contrairement à une idée répandue. On devine que, malgré des conditions de prospection nettement défavorables, le plateau des Dômes n’était pas ce lieu désert que décrivent certains auteurs (Allmer 1891 : 301 ; Denimal 1994 : 159). A une époque où les conditions de repérage étaient plus favorables que de nos jours, du fait de l’extension des zones cultivées et du recul de la forêt, P.-P. Mathieu (1866 : 504-505) avait parfaitement conscience de la densité de l’occupation antique dans cette zone de moyenne montagne. L’intense reforestation de la fin du XIXe siècle et du XXe siècle a dissimulé l’agglomération du col de Ceyssat comme bien d’autres sites de la même période. Les préjugés sur des zones considérées aujourd’hui comme marginales ont achevé de faire de cette moyenne montagne, pourtant si proche de la capitale des Arvernes, une région déserte. Les analyses paléoenvironnementales en cours corroborent pourtant l’image d’un milieu intensivement aménagé à l’époque romaine (Ballut et al. à paraître). Les conséquences des travaux de terrassement du puy Redon ont même peut-être laissé des traces dans l’habitat qui se développait en contrebas du col, à l’ouest, sous la forme de dépôts sableux accumulés par le ruissellement. Mais cet espace était plus qu’une campagne ou une montagne habitée et exploitée, aux premiers siècles de notre ère. Le puy de Dôme était une montagne sacrée, vers laquelle affluaient en masse, chaque année, des pèlerins venus des quatre coins du territoire arverne, mais aussi probablement des confins de la Gaule, voire de plus loin encore. Ces hommes et ces femmes transitaient pour la plupart par le chef-lieu de cité. Les autres arrivaient directement par l’ouest, peut-être aussi par le sud. Mais tous devaient faire halte au col de Ceyssat, point de passage obligé pour les voyageurs comme pour les dévots. Une véritable « voie sacrée » placée sous la protection de Mercure unissait la capitale et le sommet du puy de Dôme. En parcourant celle-ci, le pèlerin pouvait déjà honorer son dieu, tel ce Vindonius Silvanus qui lui fait ériger un petit sanctuaire à La Tourette, ou bien encore ce Liv(ius ?) COI[…], qui n’oublie pas d’associer la puissance divine des Augustes au dieu Mercure dans sa modeste dédicace. Cette « voie sacrée » était peut-être plus le fruit de dévotions particulières qu’un véritable programme monumental. Une autre idée mérite d’être nuancée : celle qui, sur la foi du texte de Pline l’Ancien, voit dans le Ier siècle une sorte d’acmé religieux des Arvernes, symbolisé par son temple et surtout par la statue colossale de Mercure, sculptée par Zénodore, qui suscita l’envie de Néron lui-même. Si l’on ignore où trônait le colosse de bronze, qui coûta aux Arvernes quarante millions de sesterces, et à l’artiste grec dix ans de travail, on sait maintenant que le temple du puy de Dôme, tel qu’il a subsisté jusqu’à nous, a été construit au IIe siècle et non au Ier, dans les années 140-180. Il faudrait dire « reconstruit », car le nouvel édifice s’est superposé à un sanctuaire antérieur. Le IIe siècle semble avoir été une période de grande ferveur religieuse chez les Arvernes. En témoignent de nombreux ex-voto au sommet du puy de Dôme, mais également les dédicaces du sanctuaire de La Tourette et du col de Ceyssat, datées de la seconde moitié du IIe siècle ou même du début du IIIe pour la dernière (Rémy 1996 : n°44-46, 52). A la même époque, un prêtre fédéral d’origine arverne se voit dédicacer par le conseil des Trois Gaules un monument honorifique dans sa propre cité (CIL, XIII, 1463a-c), ce qui constitue une marque d’honneur insigne (Lamoine 2002). Et un notable se fait incinérer selon un rituel spectaculaire dans la nécropole du col de Ceyssat. Ces témoignages isolés sont suffisamment convergents pour qu’il soit permis d’admettre que la puissance et le rayonnement des Arvernes furent non seulement économiques mais aussi religieux, au Ier comme au IIe siècle de notre ère.
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Dates et versions

halshs-01841497, version 1 (17-07-2018)

Identifiants

  • HAL Id : halshs-01841497 , version 1

Citer

Frédéric Trément, Lucile Humbert, Bertrand Dousteyssier, Jérôme Trescarte. L’agglomération antique du col de Ceyssat (Ceyssat, Orcines, Saint-Genès-Champanelle). Contribution à l’étude du contexte archéologique du temple de Mercure (Puy-de-Dôme). Rapport de prospection thématique avec sondages n°2001-62. [Rapport de recherche] 2001-62, Service régional de l’archéologie, DRAC Auvergne, Clermont-Ferrand. 2003, 5 vol. : 1444 p. I : Synthèse : 244 p., 83 fig. II : Données archéologiques : 360 p., 82 fig., 52 fiches de sites. III : Études de mobilier, analyses, topographie : 233 p., 30 fig., 27 pl., 6 annexes. IV : Bases de données mobilier (1) : 301 p. V : Bases de données mobilier (2) : 306 p. ⟨halshs-01841497⟩

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Dernière date de mise à jour le 28/04/2024
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