L’estampe dont il est question ici est une gravure en taille-douce à l’eau-forte rehaussée de burin qui représente le compositeur Jean-Baptiste Lully en pied devant une tenture. Au second plan apparaît un petit orchestre à cordes composé de cinq musiciens. Elle est probablement de Henri (II) Bonnart (?), publiée par Henri (II Bonnart . Il existe, selon Roger-Armand Weigert, deux états de cette estampe. Il ne s’agit pas d’un véritable portrait mais plutôt d’un « portrait de cour en mode ». Ces estampes, qu’elles concernent l’état 1 ou 2, sont cataloguées par leurs institutions détentrices sans grande cohérence. Des tirages figurent en tête d’un certain nombre de copies manuscrites des œuvres de Lully et dans quelques éditions imprimées afin d’en augmenter l’intérêt auprès d’une clientèle avide de beaux exemplaires « de cabinet ». Dans le premier cas il s’agit le plus souvent de copies réalisées par l’atelier d’Henry Foucault. En ce qui concerne les exemplaires imprimés chez Christophe Ballard ou Henri de Baussen, bien moins nombreux, l’estampe, face à ou après la page de titre, semble avoir été ajoutée après 1692 au moment de la reliure dans des éditions qui avaient été imprimées antérieurement, en 1686, 1688 (donc avant que l’estampe de Bonnart ne soit créée) et 1711. Or une partition manuscrite de Didon de Desmarest (1693), copiée par Pierre Dupont, portait encore en 1974 cette estampes (État 2) mais la partie de la lettre identifiant Lully en avait disparu et le copiste avait ajouté comme identification « Monsieur Desmarets pensionnaire du Roy », tandis que le livre ouvert posé sur la table portait le titre de « Didon ». Notre étude tente de comprendre, alors qu’on ne dispose d’aucun portrait de Henry Desmarets, quel sens donner à ce « détournement » de l’image de Lully par ce jeune compositeur qui se voyait peut-être déjà comme « un génie propre à remplacer Lully ».