On peut formuler que ce qui pousse l’homme à agir est souvent ancré au plus profond de son être. Ses désirs sont ainsi un élément moteur de son action. Pensons par exemple au désir de conservation de l’homme qui le conduit à se rapprocher d’autrui. En cherchant à satisfaire ses désirs, l’homme façonne son milieu. L’exemple le plus significatif de ce processus est celui de l’émergence des villes. Au XVIIIe siècle, Cantillon (1755, 17) souligne déjà que les hommes se regroupent « pour être à portée de se voir souvent, et jouir d’une société agréable ». Mais les bénéfices de l’agglomération vont au-delà. La ville offre bien d’autres avantages. Proches les uns des autres, les hommes peuvent interagir plus facilement et bénéficier des synergies ainsi créées. Ils échangent alors des biens, des services, des connaissances, des idées, des goûts, des sentiments affectifs, amoureux et bien d’autres choses. La ville, lieu d’échange par excellence, peut être appréhendée comme le creuset de l’évolution et du combat de l’homme pour sa survie. La fonction défensive des villes du Moyen-Âge et certaines origines étymologiques du mot ville comme pele – qui signifie habitat fortifié –, nous le rappellent (Brunet et al., 1993, 508). La ville est l’expression spatiale de nos sociétés. Elle témoigne des valeurs et des intentions de la société qui l’a créée et matérialise dans l’espace la plupart des liens qui unissent les hommes (Bourdeau-Lepage, 2012). Elle est aussi l’empreinte de la puissance de l’homme et de son pouvoir de transformer son milieu. La ville est une création de l’homme et en cela, selon certains auteurs, elle s’oppose à la nature « sauvage », qui peut se définir comme l’ensemble des éléments minéraux, végétaux et animaux qui n’ont pas été transformés par l’homme et qui lui préexistent. Aujourd’hui, à l’heure où la ville devient le plus souvent l’horizon de vie de l’homme, le citadin occidental cherche à assouvir un autre de ses désirs, celui de nature. Il cherche alors « à disposer des agréments de la ville tout en satisfaisant son désir de nature » (Bourdeau-Lepage, 2012, 2). Dans sa recherche d’une plus grande qualité de vie, matérielle et immatérielle, l’homme prend conscience de son rôle essentiel. Les utopies d’hier comme celle de Ebenezer Howard (1898) et de ses cités-jardins (qui cherchaient à allier nature et urbanité) deviennent aujourd’hui la réalité incontournable du projet urbain. L’homme semble devenir un homo qualitus. Conscient des contraintes qui pèsent sur lui, le citadin occidental réintroduit de la nature par petites touches dans son espace de vie. Une métamorphose s’opère au sein des villes : le monde végétal resurgit. Mais quelle est cette nature, objet du désir du citadin ? Comme nous le verrons, ce désir est difficile à saisir, en raison de son essence même et de la complexité de l’idée de nature. Cependant, les citadins souhaitent en majorité une nature confortable, façonnée par et pour eux (section 1) et la manière dont ils satisfont leur désir prend des formes très différentes, en constante évolution (section 2). Le citadin redécouvre les bienfaits de la nature et cherche à en profiter. La nature devient alors un objet de marketing ; elle est instrumentalisée pour réduire certaines nuisances urbaines (section 3).