Les Mendiants, les indulgences et l’argent en Europe centrale (v. 1220-v. 1520)
Résumé
This contribution examines the relationship between the Mendicants and indulgences in the Middle Ages, particularly from an economic point of view. Its field of observation is Central Europe, a region where Mendicant orders enjoyed strong and lasting success, and it is based primarily on Hungarian documentation.
After presenting the singular features of Central Europe in terms of indulgences (1), it outlines some elements of the religious teaching of the Mendicants of the region on indulgences (2), and attempts to assess the extent to which the Mendicants of Central Europe in the Middle Ages made use of the indulgences granted to visitors to their friaries (3), questions the pastoral use of these indulgences (4), endeavours to assess their role in the material running of convents (5) and finally notes their gradual disappearance in the face of jubilee pardons (6).
This paper shows that the relationship between Mendicants, indulgences and money in Central Europe in the Middle Ages was not fundamentally different from that which involved secular clerics on the one hand, and that which prevailed further west on the other. The mendicant preachers, led by Pelbart de Temesvár, did not conceal from the faithful the criteria governing the salvific efficacy of this grace. The indulgences granted to visitors to mendicant churches, which were few and far between compared to those granted to non-mendicant sanctuaries, were not so much the result of requests from the friars as the initiative of the founders and patrons of these establishments. They only generated significant income when large-scale work was being carried out on the buildings. For the rest, they brought in few resources to the convents, including the "poorest": the Franciscans of the Observance appear to have been proportionally less well endowed with indulgences than other Mendicants. The active participation of Hungarian Franciscans in the sale of Jubilee indulgences from the 1510s onwards, sometimes accompanied by financial compensation, could be linked to the extinction of indulgences benefiting Mendicant churches after 1500.
Cette contribution examine le rapport qu’entretenaient les Mendiants avec les indulgences au Moyen Âge, en particulier sous l’angle économique. Elle a pour terrain d’observation l’Europe centrale, une région où les ordres mendiants ont connu un succès fort et durable, et s’appuie en priorité sur la documentation hongroise.
Après avoir présenté les traits singuliers du terrain centre-européen en matière d’indulgences (1), elle expose quelques éléments de la pédagogie religieuse des Mendiants de la région sur les indulgences (2), tente d’apprécier le degré d’utilisation par les Mendiants d’Europe centrale au Moyen Âge des indulgences accordées aux visiteurs de leurs couvents (3), s’interroge sur l’usage pastoral de celles-ci (4), s’efforce d’évaluer leur place dans le fonctionnement matériel des couvents (5) et constate enfin leur effacement progressif devant les rémissions jubilaires (6).
Il en ressort que le rapport entre les Mendiants, les indulgences et l’argent en Europe centrale ne différait pas fondamentalement au Moyen Âge de celui qui impliquait les clercs séculiers d’une part, et de celui qui prévalait plus à l’ouest, d’autre part. Les prédicateurs mendiants, Pelbart de Temesvár en tête, ne masquaient pas aux fidèles les critères conditionnant l’efficacité salvifique de cette grâce. Les indulgences octroyées aux visiteurs des églises mendiantes, globalement peu nombreuses et peu étendues en comparaison de celles qui portaient sur les sanctuaires non mendiants, résultaient moins de la demande des frères que de l’initiative des fondateurs et patrons de ces établissements. Elles ne procuraient des rentrées d’argent significatives que dans le contexte de travaux de grande envergure sur les bâtiments. Pour le reste, elles apportaient peu de ressources aux couvents, y compris aux plus « pauvres » : les Franciscains de l’Observance apparaissent comme proportionnellement moins bien dotés en indulgences que d’autres Mendiants. La participation active des Franciscains hongrois à la vente des indulgences jubilaires à partir des années 1510, parfois accompagnée de compensations financières, pourrait avoir un lien avec l’extinction des indulgences bénéficiant à des églises mendiantes après 1500.