La récente crise liée à la covid-19 a remis en lumière les dynamiques de flux d’ordres variés entre les territoires, et notamment entre les territoires urbains et ruraux, que ce soit par le biais du télétravail, de la bi-résidentialité, de la fréquentation touristique ou de l’alimentation. Aujourd’hui, il est encore trop tôt pour mesurer certains effets dans la durée. Néanmoins, par le jeu des interactions entre les territoires, et notamment par les recompositions socio-démographiques qui en découlent (Pistre, 2013), on assiste sur le long terme à une complexification et à une transformation des espaces ruraux (Grimault, 2020). Dans le cadre de cette communication, nous souhaitons prolonger la question des dynamiques résidentielles par l’angle des connaissances co-produites par les habitants du territoire, qu’ils soient “nouveaux” ou “anciens” et plus précisément par les démarches d’intelligence collective qui peuvent être observées dans les espaces ruraux. L’intelligence collective est entendue ici comme étant « la capacité de comprendre, de réfléchir, de décider et d’agir en collaborant collectivement dans des situations territoriales particulières pour faire face à des changements sociétaux et répondre aux enjeux territoriaux actuels » (Janin et Landel, 2021). Nous faisons l’hypothèse que cette intelligence collective conduit à une hybridation des savoirs et des connaissances sur le territoire, et qu’il s’agit non pas d’un simple “transfert descendant” de connaissances “d’urbains vers les ruraux”, mais bien d’une recomposition, construction de nouveaux savoirs, qui influent alors les trajectoires des territoires en co-construisant des évolutions nouvelles. L’intelligence collective renvoie ainsi aux forces locales en présence et à leur capacité de recombinaison des ressources et des lieux face à l’évolution des systèmes économiques. Pour mesurer ces évolutions les indicateurs sont souvent d’ordre socio-économique (démographie, emplois...) ou d’inscription des résidents dans les organisations locales. Or, l’analyse des processus cognitifs peut aussi proposer des clés de lecture, avec l’objectif de distinguer les effets de ruissellement liés à des transferts de connaissance ou de réelles adaptations ou productions locales de savoir. En y contribuant, l’intelligence collective, faite d’interactions et d’hybridations, peut-elle favoriser l’ancrage des habitants et de leurs modes de vie dans le territoire ? Notre analyse ne se veut pas statistique ou historique. En s’appuyant entre autres sur le parcours du collectif "Vivre Bio en Roannais" dans le projet de recherche-action PSDR SAGACITE, nous cherchons à mettre en évidence des processus et “modes de faire” permettant à des acteurs de monter en capacité collective et en plus grande autonomie collective pour influer sur la trajectoire territoriale, et d’engager une transition sur le territoire.