Panel animé par Thomas Lamarche et Nadine Richez-Battesti L’économie sociale et solidaire (ESS) est un champ de pratiques qui est resté relativement en marge de l’analyse économique, malgré d’actifs espaces d’échanges académiques et extra-académiques. L’approche institutionnaliste elle-même peine à capitaliser les nombreux travaux empiriques qu’elle a inspirés (notamment Demoustier & Colletis, 2012, Richez-Battesti & Vallade 2012, Petrella& Richez-Battesti, 2014, Pécqueur & Itçaina, 2012) ou produits dans d’autres disciplines (par exemple en sociologie critique : Simonet 2010, 2018 ; Bory 2008 ; Hély 2009, 2019 ; Hély & Moulévrier 2013). Elle ne parvient pas non plus toujours à se situer vis-à-vis des discours normatifs investis sur l’ESS qui souffrent souvent d’un déficit de conceptualisation ou des pratiques de recherche engagées dans ou avec la pratique. Une première ambition de cette session est donc de combler cette lacune. Sans doute cette situation s’explique-t-elle par l’histoire récente de l’institutionnalisme : ses promoteurs ont dû se positionner face à l’analyse standard dominante à l’époque, sans historicité et axée sur la seule rationalité instrumentale, pour construire leur cadre d’analyse des crises et de la dynamique du capitalisme et ses formes dominantes (Boltanski & Thévenot, 1987 ; Boyer & Saillard, 1995 ; Polanyi, 1944(1983) ; …). Sans doute aussi les pensées hétérodoxes ont-elles été portées par leurs agendas qui ne laissaient pas une place significative à des pratiques relativement marginales ou peu saillantes dans les dynamiques d’ensemble. Mais la diversité des pratiques au sein de l’ESS est aussi un défi théorique : quoi de commun entre une association de quartier rassemblant uniquement des bénévoles, une coopérative soumise à la concurrence internationale comme Mondragon, ou le secteur mutualiste dont le développement et la recomposition s’adosse pour une grande part sur les phases de développement de l’Etat social ? Et même au sein du mouvement coopératif, des configurations très différentes coexistent, allant de la marginalité à la domination sectorielle. Peut-on les saisir dans un même cadre d’analyse, avec quels concepts et quels outils d’enquête, pour en comprendre la structure commune – si elle existe – en même temps que les dynamiques de différenciations ? Certains développements de la théorie de la régulation, qui ont mis l’accent sur la variété des configurations locales ou sectorielles (Laurent & du Tertre (dir), 2008), offrent une perspective intéressante. En effet, l’analyse en termes d’espaces méso permet de réfléchir « d'une part, [à] la régulation interne de la reproduction d'un certain type de structures d'entreprises ou d’acteurs, et d'autre part, [à] la régulation de l'articulation de cet espace à l'économie globale. ». L’espace méso cherche donc à saisir « les tensions liées aux dynamiques historiques, sociales, économiques ou écologiques – au sein des dynamiques de l'accumulation capitaliste – [qui] génèrent des processus de différenciation sociales » (Lamarche et al., 2015). Il s’agit de saisir les processus de différenciation qui s’appuient sur l’autonomie relative des différents espaces où s’organisent les organisations productives. En particulier, la coopérative paraît être de ce point de vue un objet heuristique. L’agenda de la recherche est alors nourri d’un travail sur des formes alternatives d’organisation, tout en gardant un regard critique sur ce qui peut advenir en leurs noms. Pour avancer dans ce type d’analyse, les propositions attendues pour ce panel peuvent prendre pour objet : a) les coopératives (ou autres formes de l’ESS), en mobilisant tout type de méthode d’analyse en sciences sociales jugé pertinent ; b) les articulations entre cette problématique méso et les approches institutionnalistes, en prenant appui sur des logiques sectorielles ou territoriales. Par exemple, comment des acteurs et des organisations développent des compromis plus ou moins localisés intégrant des fonctions socio-politiques autour d’un secteur, d’un territoire ou encore autour de professions, de formes organisationnelles… ? Même si elle est inaboutie, comment s’opère la différenciation par rapport au régime dominant et, par suite, comment cet espace méso s’articule-t-il à la régulation d’ensemble ? Propositions à adresser à Thomas.lamarche@u-paris.fr & nrichezbattesti@wanadoo.fr avant le 15 avril : maximum 2 pages en prenant soin de bien préciser la question traitée, son mode de traitement ainsi que les matériaux et/ou champ conceptuel investis. 2 Bourbousson Céline, Université de Corse, La régulation méso de l'ESS par la politique PTCE : opportunité ou aveuglement ? Defalvard Hervé, ERUDITE, Chaire ESS-EGE, La société du commun : quelles révolutions pour l’économie sociale et solidaire ? Plumecocq Gael, Arnaud Charlène, Vers un Business Model plus durable ? Une analyse du processus d’innovation par l’économie des grandeurs. Le cas d’une coopérative agricole en région Occitanie Ballon J., Celle S., Fretel A., Vallade D., Coopératives & théorie de la régulation : vers un rapport social de travail coopératif ? Chevalier Marius, Dellier Jullien, Université de Limoges, Déterminants méso de la démocratie dans les organisations