Les grands cycles biogéochimiques sont perturbés par les villes et les activités industrielles. Cette situation est le fruit d’une histoire sociotechnique. L’étude de la trajectoire des politiques biogéochimiques de l’agglomération parisienne de l’après-Seconde Guerre mondiale aux années 1990 permet de mieux saisir, à travers un cas d’étude précis, comment cette perturbation s’est construite et surtout renforcée au cours de la grande accélération qui marque la seconde moitié du XXème siècle. En particulier, c’est en étudiant les relations et les évolutions respectives de divers secteurs d’activités (principalement le traitement des ordures ménagères, la gestion des urines et des matières fécales, l’agriculture mais aussi la production d’énergie et les transports) que l’on peut saisir comment le système alimentation-excrétion actuel est apparu. Cette recherche permet de mettre à jour des choix implicites et explicites de nature politique qui conditionnent le développement technique dans une voie de linéarisation des cycles naturels. L’exemple du traitement des ordures ménagères est développé. Au stade actuel de la recherche, une nouvelle vue d’ensemble de sa trajectoire historique peut d’ores et déjà être dressée. Elle révèle que l’utilisation agricole connait un certain regain au cours des Trente Glorieuses et que l’incinération ne domine définitivement les modes de traitement qu’après le milieu des années 1970. Elle permet d’esquisser en définitive quelques premiers éléments d’analyse susceptibles d’expliquer l’orientation générale du système technique et l’éviction des alternatives.