Lors d’un cours à l’Université de Strasbourg, à propos de la disparition de moult au profit de très et beaucoup, une étudiante a interrompu le cours, voulant signaler que moult était tout à fait présent dans la langue d’aujourd’hui, en tout cas dans la sienne. Désigné comme régional ou vieux et plaisant par le TLFi, vieux ou ironique par le Larousse en ligne, moult n’en est en effet pas moins présent dans la langue moderne, et pas uniquement en contextes archaïsants, comme l’attestent les exemples relevés sur le forum jeuxvideo.com : (1)Si vous avec [lire avez] moult amis et appréciez tous le fait de jouer à Fortnite, sachez que vous pouvez à présent créer des lobbies de plus de quatre joueurs dans certains modes. (http://www.jeuxvideo.com/news/1040102/fortnite-jusqu-a-16-joueurs-peuvent-desormais-s-allier-dans-les-modes-temporaires.htm) Dans cette contribution, nous étudierons l’évolution des emplois de moult dans l’histoire du français, en particulier à partir du 16e s. jusqu’au français contemporain. À la place d’une disparition attendue et annoncée, moult s’est ainsi installé dans la langue, en partie dans des constructions semi-figées (type après moult + substantif désignant l’hésitation ou un problème – tergiversations, rebondissements, péripéties…). Cependant, conformément à la préférence pour une plus grande distinction catégorielle qui s’est installée au cours du français, nous verrons que moult est aujourd’hui exclusivement employé comme déterminant.