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Communication dans un congrès Année : 2022

Espace des lieux, espace flux : approche spatiale et réticulaire des tiers lieux

Patrice Tissandier
  • Fonction : Auteur
  • PersonId : 1132380

Résumé

A l’échelle internationale, le nombre de tiers-lieux a été multiplié par 10 entre 2011 et 2017 (Global Coworking Survey, 2017). Une « dynamique tiers-lieux » similaire est constatée en France par les rapports France Tiers-Lieux et Lévy-Waitz (2018 et 2021) qui ont produit des estimations de 1 800 tiers-lieux en 2018, 2 500 en 2021 et une prévision entre 3 000 et 3 500 en 2022. Kaléidoscope sociétal (Krauss et Tremblay, 2019, p.15), le tiers-lieu apparaît pour certains comme un objet d’expérimentation d’usages, à la frontière entre plusieurs mondes sociaux, culturels et politiques (Liefooghe, 2018) permettant un brassage d’idées et un libre partage des ressources et des compétences. A contrario, Besson (2018) voit dans l’émergence de nouvelles formes de tiers-lieux culturels un glissement vers des espaces génériques qui, vidés de leurs substances, seraient voués à l’échec. Plusieurs témoignages d’utilisateurs de tiers-lieux (Movilab, Réflexions sur la toxicité et les Tiers Lieux) illustrent une autre des limites des tiers-lieux, le définissant comme un milieu où règne l’entre-soi. Les tiers lieux nourrissent des représentations contrastées entre espoirs mais aussi fantasmes, à la fois lieux de sociabilité ouverte mais promoteurs d’entre-soi et de gentrification. L’objectif des recherches actuelles serait ainsi de recueillir des données qui permettent de mieux cerner la réalité de ces configurations. Leur rapide développement atteste d’un besoin pour les territoires. Les questions sous-jacentes qui se posent aujourd’hui sont celles de leur viabilité mais aussi celles de leurs impacts réels sur la durabilité des territoires. Travailler sur la viabilité des tiers-lieux impose nécessairement de dépasser la stricte approche économique. Les tiers-lieux sont générateurs de biens matériels mais également de biens non-marchands. L’activité du tiers-lieu est productrice de connaissances, d’échanges formels et informels, d’apprentissage. Elle s’appuie sur des valeurs qui prônent l’indivisibilité, la non-rivalité, la non-excluabilité qui peut les associer à des biens communs par conséquent irréductibles au statut de marchandise (Moulier-Boutang, 2008). Comment mesurer les externalités positives produites par les tiers-lieux que sont l’accès à la formation, l’offre culturelle ou de loisirs, la recherche, la formation de réseaux, l’innovation ? La nécessité d’une telle problématique s’impose également par le fait que le tiers-lieu montre une forte capacité de diffusion qui a des impacts concrets sur les territoires où il est implanté (Burret, 2013 ; France Tiers-Lieux et Coopérative Tiers Lieux, 2020). Dynamiseurs de l’économie “présentielle” (Terrier, 2006), les tiers-lieux apparaissent également comme propices à la valorisation des atouts et potentialités d’un territoire, de ses avantages “différenciatifs” (Pecqueur, 2014). A l’image des LIBS (local intensive business services) analysés par Talandier (2020) comme levier « d'intermédiation essentiel pour garantir la résilience des territoires et engager une transition écologique », les pouvoirs publics ont identifié les tiers-lieux comme des acteurs de développement économique, social, voire écologique de leurs territoires (Liefooghe, 2017). Comment identifier et mesurer ces effets sur la durabilité des territoires qui les accueillent ? Qu’il soit abordé par le prisme des formes de travail (Fondation Travailler Autrement, 2018), par son importance économique (Bouchez, 2020) ou son possible rôle social (Billaudeau et Charles, 2021), le tiers-lieu est fondamentalement associé à la notion de territoire (Pineau, 2018). L’ancrage territorial fait partie des fondements premiers des tiers-lieux. Les tiers-lieux sont également étroitement associés à la notion de réseau. Par l’intermédiaire de ces lieux il s’agit de construire des réseaux sociaux basés sur des relations de proximité favorisant l’innovation. Les tiers-lieux sont une “localisation”, à savoir une entité en interaction avec l’écosystème territorial ; Marinos et Krauss (2017) ont par exemple analysé l’influence de l’emplacement du tiers-lieu sur la composition et le profil des utilisateurs. Ils sont également un "nœud” vers des réseaux de différentes échelles spatiales, du local (en tant que forme d’organisation qui s’appuie sur des individus réunis en collectifs utilisant des modes d’interactions basés sur des valeurs, des pratiques ou des activités professionnelles) au global (des échanges de connaissances et d’expériences permettant d’améliorer le montage de projets et de co-construire des modèles viables de tiers-lieux se font aussi par l’intermédiaire d’Internet avec des outils en Open Source). Pour analyser la viabilité des tiers-lieux et leur usage comme vecteur de durabilité, la combinaison d’approches spatiales et réticulaires s’impose : les tiers-lieux seraient tout autant un espace des lieux qu’un espace des flux (Castells, 1996). Il s’agit dès lors de dépasser les seules analyses axées sur des mesures de distances euclidiennes pour leur adjoindre des entrées réticulaires. Quel est le poids de la distance euclidienne versus la distance réticulaire ? Un tiers-lieu “loin de tout” spatialement mais proche topologiquement de la bonne ressource possède-t-il une plus grande viabilité ? La nature et l’intensité des relations qui relient les nœuds font également partie des éléments à analyser, il s’agit autant de qualifier le contenu de ces relations que de les quantifier.

Domaines

Géographie
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Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)
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Dates et versions

halshs-03937032, version 1 (13-01-2023)

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  • HAL Id : halshs-03937032 , version 1

Citer

Patrice Tissandier. Espace des lieux, espace flux : approche spatiale et réticulaire des tiers lieux. 58ème Colloque de l'ASRDLF, Sciences Po Rennes, Jun 2022, Rennes, France. ⟨halshs-03937032⟩
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Dernière date de mise à jour le 27/04/2024
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