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Communication dans un congrès Année : 2021

Chroniques contre chroniques : l’institutionnalisation d’une philologie romane « nationale » entre Montpellier et Paris

Résumé

La création de revues spécialisées, espaces de stabilisation et de diffusion des savoirs savants, compte parmi les indices majeurs de leur disciplinarisation (Chiss et al. (eds.) 2012). En ce qui concerne la philologie romane en France, on peut considérer que ce processus se développe avec la naissance de la Revue des langues romanes en 1870 puis de la Romania en 1872. À partir de 1874, un autre marqueur d’existence institutionnelle, l’ouverture de chaires universitaires dédiées dans le Midi de la France, fait l’objet d’échanges suivis entre ces deux revues. Numéro après numéro, la rubrique « Chronique », présente dans les deux revues et, plus ponctuellement, les comptes rendus réciproques des dernières livraisons de chacune (voir Brun-Trigaud 2001) révèlent que ces échanges sont à replacer dans un contexte plus large. On questionnera donc la dimension « nationale » du processus de disciplinarisation à partir de l’analyse du contenu de ces rubriques, qu’on mettra en perspective à l’aide de documents archivistiques (fonds Gaston Paris ; Archives nationales, série C). Sur le plan scientifique, les vues divergentes des collaborateurs des deux revues ont été soulignées à plusieurs reprises (voir p. ex. Bergounioux 2001; Zantedeschi 2012) dans le prolongement de l’interrogation générale formulée par Philippe Martel et Pierre Boutan (2001, p. 332) : « la Société pour l’étude des langues romanes et la revue qui lui sert d’organe ont-elles voulu constituer le lieu d’élaboration d’une linguistique méridionale, distincte par ses ambitions, ses objets, ses méthodes, de la linguistique universitaire “nationale” symbolisée par [Gaston Paris et Paul Meyer] ? » Outre la rivalité entre Montpelliérains et Parisiens, les deux revues s’accordent toutefois sur certains points. La mise en regard des rubriques « Chronique » permet de reconstruire, à travers un dialogue constitué d’arguments contradictoires, un récit commun de l’institutionnalisation de la philologie romane en France, dont le premier temps s’achève en 1879 avec l’ouverture des chaires d’Anatole Boucherie et de Camille Chabaneau. Dans ce cadre, le terme même de « philologie romane » et son caractère « national », revendiqués par les deux partis, méritent d’être interrogés. Sur le plan des politiques éducatives, ce dialogue entre les deux revues s’inscrit dans l’actualité du vote de la loi Laboulaye du 13 juillet 1875 sur la liberté de l’enseignement supérieur et ses prolongements (Guislin 2012). Ainsi la place du modèle universitaire allemand, particulièrement prégnant dans le domaine de la philologie (voir p. ex. Werner 1990), est-elle évoquée dans la pétition demandant l’ouverture de chaires de philologie romane, reproduite dans les deux revues. Cependant, les échanges entre philologues parisiens et montpelliérains via les rubriques « Chronique » font également apparaître d’autres modèles : l’Angleterre et l’Italie. Plus largement, les collaborateurs des deux revues s’opposent quant à la spécialisation des enseignements universitaires : celle des enseignants et celle des étudiants. À la même période, les arrêtés du 5 novembre 1877 (Brunet 1877a; 1877b) créent l’un, le corps des maîtres de conférences et l’autre, les bourses de licence qui marquent le moment où « l’étudiant naît » (Prost 1968, p. 230). Enfin, au-delà du débat strictement universitaire, l’enjeu de la discussion est aussi la formation des enseignants du secondaire.
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Dates et versions

halshs-04043856, version 1 (24-03-2023)

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  • HAL Id : halshs-04043856 , version 1

Citer

Muriel Jorge. Chroniques contre chroniques : l’institutionnalisation d’une philologie romane « nationale » entre Montpellier et Paris. Montpellier et Paris, cités savantes. Pour une histoire comparée de Romania et de la Revue des langues romanes, Oct 2021, Montpellier, France. ⟨halshs-04043856⟩
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Dernière date de mise à jour le 07/04/2024
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