L'émeute est un objet spécifique, dont le sens n'est donné par aucune organisation qui viendrait émettre un mot d'ordre ou formuler une revendication. Les émeutiers eux-mêmes sont généralement muets ou n'ont pas la parole. Du coup, la question de la signification de ces événements est au cøeur des débats. À travers une lecture croisée des émeutes de 2005 en France et de 2011 en Grande-Bretagne, cet article se propose d'analyser la façon dont des interprétations plus ou moins concurrentes, construites par des catégories différentes d'acteurs, tentent d'organiser et de rationaliser des faits qui, de prime abord, se donnent à voir comme une irruption de rage ou de colère. Face à la stigmatisation et à l'invisibilité politique des habitants des quartiers difficiles, nous soulignons la nécessité de développer des formes d'auto-organisation des acteurs de la société civile locale, pour que ces derniers et en particulier les jeunes puissent imposer pacifiquement leur présence et leur parole dans l'espace public.