Limites et potentiels d’une recherche-création ancrée au sein d’une industrie culturelle - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Communication Dans Un Congrès Année : 2024

Limites et potentiels d’une recherche-création ancrée au sein d’une industrie culturelle

Résumé

Cette communication propose une réflexion sur les limites et les potentiels d’une recherche-création ancrée dans une entreprise d’une industrie culturelle. Née dans les années 1980 dans le champ de l’art (Nelson, 2013), la recherche-création est moins à l’heure actuelle une discipline qu’une multitude de pratiques (Paquin et Noury, 2018) dont certaines portent sur des objets médiatiques, comme les jeux vidéo (par exemple, en France : Genvo, 2012 ; Lelièvre, 2012 ; Serdane, 2014 ; Siegel, 2015 ; Sohier, 2016). Parallèlement à l’ouverture à de nouveaux objets, se développent de nouvelles pratiques de recherche-création, qui s’inscrivent moins dans une perspective artistique que dans une perspective médiatique. Louis-Claude Paquin et Cynthia Noury (2020) proposent ainsi plusieurs critères de distinction d’une RC médiatique, notamment : un questionnement sur les médias, une dimension collective de l’action, et une reconnaissance de l’objet dans des circuits médiatiques plutôt qu’artistiques. Autre avatar des pratiques qui mélangent recherche théorique et production pratique, la recherche-projet, définie par Alain Findelli et Anne Coste (2007), se distingue par une volonté de changement d’un état du monde – l’ensemble du travail s’effectuant dans un régime d’action collectif “orienté-futur”. Dans la lignée de ces approches – qui s’éloignent des perspectives artistiques faisant de la RC avant tout un moyen de résistance à des injonctions capitalistes (Manning & Massumi, 2018) – il s’agit d’envisager une recherche-création qui ne porterait pas seulement sur des objets médiatiques et des processus collectifs, mais qui s’ancrerait matériellement et financièrement dans une entreprise. Cette réflexion paraît particulièrement importante à l’heure de la précarisation de la recherche à l’université parce qu’elle invite à un questionnement sur ce que l’inscription de la recherche dans le monde de l’entreprise signifie pour la construction de savoirs, comme les effets de la temporalité néolibérale (Bouffartigue et Lanciano-Morandat, 2013) ou comme les conséquences d’un modèle technoscientifique (Alferi et al., 2015). Il ne s’agit ainsi pas de dire que la recherche-création ancrée dans une industrie culturelle serait fondamentalement bénéfique et dénuée de tout soupçon, mais, d’une manière très pragmatique, d’en envisager les limites et les potentiels. 1- D’abord, on peut s’interroger sur les formes nouvelles que prend la recherche-création médiatique en entreprise. Par exemple, comment fait-on de la recherche par la création d’un dispositif sachant que les contraintes créatives ne viennent pas seulement d’hypothèses de recherche, mais aussi de nécessités économiques ou de choix stratégiques dans une industrie concurrentielle ? Dans cette logique de remise en question des modèles conventionnels de recherche et de création, il s’agit aussi de questionner comment s’opère la circulation des savoirs et ainsi d’observer comment peuvent dialoguer les disciplines scientifiques des sciences du jeu et de la narratologie post-classique et le champ du narrative design, c’est-à-dire “la création de l’histoire et le design des mécaniques par lesquelles elle est racontée.” (Posey, 2008). 2- Ensuite, il est possible d’aborder les conditions de possibilités d’une RC ancrée dans une industrie culturelle. En s’inscrivant à la suite des travaux de Donna Haraway (1988) et Sandra Harding (1995) sur le savoir situé, on insistera alors sur l’importance du dévoilement et de l’explicitation de l’ancrage de la recherche. Parallèlement, suivant les réflexions récentes sur une éthique du care (Fisher et Tronto, 1991) dans le design (Royer et Pellerin, 2022), on proposera une réflexion sur des processus de design soutenables pour préserver les designers, les artistes et leur élan créatif au sein d’une industrie concurrentielle. 3- Finalement, il s’agira de questionner les apports de la RC ancrée dans une entreprise culturelle. Dans la lignée de certains travaux sur les cultures médiatiques (notamment Letourneux, 2017) et les Game Production Studies (par exemple Keogh, 2023), elle permet notamment de comprendre comment le contexte socio-économique et les conditions de production influent sur la forme des objets. Plus précisément, elle met en lumière le fait qu’il ne s’agisse pas de logiques unidimensionnelles dont les œuvres sont les purs produits, mais plutôt de dynamiques contraires, qui se matérialisent dans le design par des compromis. Pour répondre à ces interrogations, sera adoptée une méthodologie proche du récit de pratique (Paquin, 2019) qui concernera l’ensemble du travail mené dans le studio indépendant The Seed Crew de 2020 à 2024. Le travail d’analyse de la documentation et des entretiens collectifs sur les événements marquants et les processus de décision permettront ainsi d’illustrer les limites et potentiels d’une RC qui s’ancre au sein d’un studio indépendant de jeu vidéo.
Fichier non déposé

Dates et versions

halshs-04614126 , version 1 (17-06-2024)

Licence

Identifiants

  • HAL Id : halshs-04614126 , version 1

Citer

Gabrielle Lavenir, Hélène Sellier. Limites et potentiels d’une recherche-création ancrée au sein d’une industrie culturelle. limit/no limit, Jan 2024, Paris, France. ⟨halshs-04614126⟩
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