La question foncière constitue un problème juridique et social relativement ancien en Polynésie française dont la complexité s’est surtout construite à partir de la période coloniale. Les transformations économiques, démographiques et sociales de la période contemporaine ont toutefois contribué à en faire désormais l’un des grands enjeux de cette collectivité, à la fois du point de vue des conflictualités familiales qu’elle génère et des défis qu’elle pose à l’institution judiciaire en termes de traitement des procédures. Les litiges liés à la propriété de la terre traversent aujourd’hui l’ensemble des milieux sociaux sur ce territoire. Les demandes de sortie du statut d’indivision des terres familiales (statut qui concerne environ 57% des terres de la collectivité) constituent le point névralgique du problème, justifiant la mise en place d’une structure dédiée inédite au sein de la République française : le tribunal foncier de Polynésie française (2019). Cette communication présente les résultats d’une enquête qualitative auprès de justiciables engagés dans une procédure de sortie d’indivision des terres familiales. On s’intéresse à la production sociale du droit foncier comme mode de sécurisation des ressources dans ce contexte, entre stratégies collectives et conflictualités inter et intra générationnelles. Dans un premier temps, l’analyse des récits de vie permet de montrer en quoi l’accès à la terre est devenu un enjeu important et conflictuel au sein des familles contemporaines, dans un contexte caractérisé par des crises multiples. Dans un second temps, l’analyse des parcours d’accès au droit permet d’identifier les freins et les leviers mobilisés par les individus pour obtenir la propriété de terres, montrant une imbrication de démarches judiciaires et d’arrangements informels dans le cours ordinaire des pratiques sociales.