La réflexion sur les inventaires d’archives, au-delà d’une simple histoire des techniques archivistiques, ne peut pas ne pas être mise en rapport avec l’ensemble des interrogations qui traversent le monde des historiens et historiennes depuis la fin du XXe siècle et qui consistent à prendre au sérieux la question de la transmission, non plus aux seules fins de garantir la véracité des documents mais de réfléchir sur les effets des conditions de transmission sur la capacité des historiens et historiennes à produire un discours dont ils ou elles maîtrisent les déterminations. Du point de vue de ses conditions de production, l’inventaire d’archives relève de la catégorie de la liste et de la pratique de l’enquête, ce qui en fait un dispositif cognitif. Du point de vue des conditions d’utilisation, l’usage d’un inventaire d’archives par les historiens et historiennes constitue le plus souvent un détournement de sa fonction initiale (pour les archivistes) et, sauf à en saisir la logique, débouche fréquemment sur des impasses, liées à ce qu’un archiviste qualifie d’« analphabétisme documentaire ».